Le Canada sous le choc après la découverte de 751 tombes près d’un pensionnat pour autochtones

Le Canada sous le choc après la découverte de 751 tombes près d’un pensionnat pour autochtones

Plus de 750 tombes ont été découvertes lors de fouilles près d’un pensionnat pour autochtones géré par l’Église catholique, moins d’un mois après la découverte des restes de 215 enfants à proximité d’un établissement similaire. Cette annonce, jeudi, témoigne des abus et mauvais traitements subis par des dizaines de milliers d’enfants indigènes victimes d’assimilation forcée à la culture occidentale.

Une nouvelle découverte macabre oblige le Canada à plonger dans l’un des pans les plus sombres de son histoire. Une communauté autochtone a annoncé, jeudi 24 juin, la découverte de plus de 750 tombes anonymes sur le site d’un pensionnat pour enfants indigènes dans l’ouest du pays. Cette découverte, qui intervient un mois après l’identification des restes de 215 d’écoliers près d’un autre établissement autochtone géré par l’Église catholique, illustre le calvaire vécu par des milliers d’enfants indigènes.

« Nous avons repéré 751 tombes non marquées », sur le site d’un ancien pensionnat hébergeant des enfants autochtones à Marieval, en Saskatchewan, dans l’ouest du Canada, a déclaré jeudi le chef de la nation Cowessess, Cadmus Delorme.

« Ce n’est pas une fosse commune, ce sont des tombes non-identifiées », a-t-il ajouté. Les victimes sont principalement des enfants, selon lui. Le nombre exact de tombes doit être confirmé dans les prochaines semaines, en raison d’une marge d’erreur des géo-radars utilisés, a-t-il ajouté.

Quelques tombes ont sans doute été surmontées de stèles identifiant les victimes, mais certaines d’entre elles ont été retirées « par des représentants de l’Église catholique », un geste criminel au Canada, selon lui.

Traumatisme

Ces découvertes ravivent le traumatisme vécu par quelque 150 000 enfants amérindiens, métis et inuits, coupés de leurs familles, de leur langue et de leur culture et enrôlés de force jusque dans les années 1990 dans 139 de ces pensionnats à travers le pays.

Nombre d’entre eux ont été soumis à des mauvais traitements ou à des abus sexuels, et plus de 4 000 y ont trouvé la mort, selon une commission d’enquête qui avait conclu à un véritable « génocide culturel » de la part du Canada.

Le Premier ministre Justin Trudeau, qui a dit sa « peine » jeudi dans un communiqué, a estimé que le Canada devait « tirer les leçons de (son) passé et avancer sur le chemin commun de la réconciliation ».

C’est un « crime contre l’humanité », a dénoncé jeudi le chef de la Fédération des nations autochtones souveraines de la province de la Saskatchewan, Bobby Cameron. « Le seul crime qu’on ait jamais commis était d’être nés autochtones », a-t-il affirmé.

« Nous trouverons d’autres corps et nous ne nous arrêterons que lorsque nous aurons trouvé tous les enfants », a promis le responsable.

Les fouilles autour de cette ancienne école de Marieval avaient débuté fin mai après la découverte des restes de 215 écoliers enfouis sur le site d’un autre ancien pensionnat, celui de Kamloops, en Colombie-Britannique, province la plus à l’ouest du pays.

« Tragique mais pas surprenant »

Cette découverte avait provoqué une onde de choc au Canada et relancé le débat sur ces institutions honnies où les enfants autochtones étaient envoyés de force afin d’y être assimilés à la culture dominante.

Elle avait également relancé les appels à l’intention du pape et de l’Église à présenter des excuses pour les abus et violences dont ont souffert les élèves de ces pensionnats. Le souverain pontife s’était toutefois refusé à présenter de telles excuses, provoquant la colère et la frustration des communautés autochtones canadiennes.

De leur côté, les experts en droits humains de l’ONU ont exhorté Ottawa et le Vatican à mener une enquête rapide et complète. « C’est absolument tragique mais pas surprenant », avait réagi dès mercredi soir Perry Bellegarde, chef de l’Assemblée des Premières nations, qui représente plus de 900 000 autochtones au Canada, sur son compte Twitter.

Le pensionnat de Marieval, dans l’est de la Saskatchewan, a accueilli des enfants autochtones entre 1899 et le milieu des années 1990, avant d’être démoli et remplacé par une école de jour.

Interrogé sur la chaîne CBC, un ancien pensionnaire de l’école de Marieval, Barry Kennedy, a estimé que cette nouvelle découverte n’était que la partie émergée de l’iceberg. « J’imagine que, vous savez, d’après les histoires qui ont été racontées par nos amis et camarades de classe, il y a plusieurs endroits (où se trouveraient des sépultures) par école », a-t-il expliqué.

Dans la foulée de la découverte des restes d’enfants au pensionnat de Kamloops, des fouilles ont été entreprises autour de plusieurs de ces anciens établissements scolaires partout au Canada, avec le concours des autorités gouvernementales.

France 24 Avec AFP