Danemark : Un « coronapas »(passeport vaccinal) obligatoire pour fréquenter les lieux publics…

Danemark  : Un « coronapas »(passeport vaccinal) obligatoire pour fréquenter les lieux publics…

Le pays scandinave va se déconfiner en instaurant ce passeport, obligatoire pour les plus de 15 ans, permettant d’accéder aux cafés, restaurants et lieux culturels

Le Danemark lance mardi son « coronapas », le sésame pour la réouverture de la société plongée dans un semi-confinement depuis début janvier. « C’est une arme très puissante et une protection de la communauté et de l’individu », a assuré la Première ministre sociale-démocrate, Mette Frederiksen, en annonçant le 23 mars son plan de réouverture « prudente et responsable » du royaume, à la suite d’un accord avec quasiment tous les partis du Parlement.

Vers « la levée par étapes des restrictions », tel est le mot d’ordre des politiques au vu d’une situation sanitaire en amélioration. Au 4 avril, le taux d’incidence variait de 0 à 242 nouvelles infections pour 100 000 habitants, le nombre d’hospitalisés était en baisse, à 211, et celui des décès se stabilisait à 2 429 pour 5,8 millions d’habitants tandis que 13,1 % de la population avait reçu la première dose de vaccin et que 6,9 % était totalement vaccinée.closevolume_off

Réouverture des lieux de culture

Clé de « la réouverture sécurisée » du pays, selon la dirigeante danoise, ce passeport obligatoire pour les plus de 15 ans, téléchargeable sur le site officiel sunhed.dk ou imprimé en papier, garantit que son porteur est vacciné, qu’il a effectué un test négatif il y a moins de 72 heures ou encore qu’il a été infecté. Ce « sésame » sera nécessaire pour entrer dès le 6 avril dans les salons de coiffure, d’esthétique, de tatouage, de massage et les auto-écoles, et pour accéder le 21 avril aux terrasses des cafés et restaurants.

Il permettra également d’entrer, le 21 avril, dans les musées, galeries d’art, bibliothèques, puis dans les théâtres et cinémas et à l’intérieur des cafés et des restaurants le 6 mai ainsi que d’accéder aux activités sportives, aux zoos et parcs d’attractions dès le 21 mai. Les autorités ont appelé les professionnels du commerce, des loisirs et des sports à réclamer scrupuleusement ce « coronapas » à leurs clients, faute de quoi ils risquent des amendes de 400 à 1 600 euros, aggravées en cas de récidives.

Critiques

« Soulagé » après trois mois de fermeture, Rune Bonde, coiffeur, n’en est pas moins sceptique. « Nous allons perdre beaucoup de clients à cause de ce passeport que nous devons exiger », se désole-t-il. L’introduction de ce laissez-passer a été approuvée avec des réserves, après des négociations difficiles entre le gouvernement et les partis. Ainsi la Liste de l’unité (extrême gauche) et l’Alliance libérale étaient dubitatives, exigeant, pour donner leur accord, une date de son expiration à l’été, « lorsque les Danois qui le souhaitent seront tous vaccinés ». La seule formation à ne pas y adhérer, Les Nouveaux Bourgeois (droite), s’est affichée « résolument contre ce nouveau moyen de contrôle des citoyens », selon sa présidente, Pernille Vermund.

Les professionnels de diverses branches sont tout aussi critiques. « C’est problématique. Nous préférerions attendre une normalisation de la situation pour rouvrir sans ce passeport qui est un casse-tête pour nos membres », estime Katia Oestergaard, directrice de Horesta, la branche des hôtels et restaurants. Car « il n’est pas possible pour nos adhérents de travailler dans ces conditions où ils doivent jouer le rôle de policier et appliquer un protocole sanitaire très strict ». « Il est difficile de comprendre, poursuit-elle, pourquoi on doit être testé pour s’asseoir à la terrasse d’un restaurant alors que l’on peut entrer directement dans un supermarché à côté et faire ses courses dans la cohue, avec le risque de se faire contaminer, sans ce coronapas. »

« Clé de retour à la vie d’avant »

Dépité, Philip Lundsgaard, propriétaire du restaurant Riva & Bistro à Rungsted Havn, au nord de Copenhague, ne pense pas rouvrir. « Je n’ai pas les moyens de le faire dans les conditions fixées par les autorités, un client maximum pour 7,5 mètres carrés, ce qui signifie que je ne peux avoir en terrasse que 11 clients au lieu de 80 normalement. C’est insensé, je viendrais à perdre de l’argent ! » fulmine-t-il. La controverse atteint les réseaux sociaux, où les critiques abondent contre ce « coronapas intrusif » mais où il y a aussi des louanges – plus rares – de « cette clé de retour à la vie d’avant ».

Ainsi, Karina Kristensen refuse ce « coronapas » : « Je ne souhaite pas me faire vacciner et je ne veux pas qu’on m’empêche d’aller au café, au restaurant ou au cinéma et qu’on me prive de ma liberté. . Mais certains, à l’instar de Gitte Frydendal, appellent leurs concitoyens à la raison. « Arrêtez de pleurnicher, dit-elle. On doit se serrer les coudes en ces temps difficiles pour retrouver une vie normale. C’est le prix à payer, et cela en vaut la peine. » En dépit des critiques, le « coronapas » ravit néanmoins les Danois grands voyageurs (9,3 millions de voyages de loisir à l’étranger en 2019), qui espèrent avec ce passeport repartir à la découverte du monde.

Avec LePoint.fr