🇷🇺 Une fin d’année marquée par une escalade de la violence entre la Russie et l’Ukraine

🇷🇺 Une fin d’année marquée par une escalade de la violence entre la Russie et l’Ukraine

Pour la première fois depuis le début du conflit, des frappes ukrainiennes ont atteint le centre d’une ville russe. Hier, samedi à Belgorod, les autorités ont dénombré 22 morts dont trois enfants et environ 110 blessés. Vendredi, les bombardements russes en Ukraine ont tué 40 personnes, dont 17 dans la capitale Kiev, selon les autorités. Ce dimanche, Vladimir Poutine et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky prononcent leur discours pour le Nouvel an tandis que les frappes se poursuivent. 

La Russie a lancé ce dimanche 31 décembre à l’aube de nouvelles attaques contre l’Ukraine, au lendemain de la frappe imputée à Kiev sur la ville russe de Belgorod. Des explosions ont retenti dans plusieurs villes ukrainiennes, dont Kiev, Kharkiv et Zaporijia. Moscou déclare avoir frappé des cibles « militaires » dans la ville ukrainienne de Kharkiv, les autorités locales assurant au contraire qu’il s’agissait de bâtiments civils.

Kiev affirme avoir abattu 21 des 49 drones lancés vers son territoire dans la nuit, ajoutant que six missiles guidés avaient aussi visé cette même ville de Kharkiv, dans le nord-est. L’armée de l’air a dit avoir enregistré 49 drones Shahed, de fabrication iranienne, ciblant particulièrement les régions de Kharkiv, Kherson, Mykolaïv et Zaporijjia, dont 21 ont été « détruits ». Elle n’a pas indiqué si les six missiles avaient atteint leur cible.

Kharkiv plus sérieusement touchée

À Kharkiv, plusieurs bâtiments du centre-ville ont été touchés et sérieusement endommagés, façades éventrées, vitres brisées après les frappes de ces six missiles guidés, selon les autorités ukrainennes. Le maire, Ihor Terekhov, affirme que l’attaque s’est déroulée en plusieurs vagues. Il évoque des cafés, des magasins et des immeubles résidentiels touchés par les frappes russes et des incendies. L’hôtel Kharkiv Palace, un bâtiment moderne en verre d’une dizaine d’étages, a été sérieusement endommagé. Le lieu héberge régulièrement des humanitaires, des dignitaires et des journalistes étrangers. Le gouverneur de la région de Kharkiv, Oleg Sinegoubov, évoque aussi des cliniques ou des hôpitaux touchés. Parmi les personnes blessées, selon les autorités ukrainiennes, figurent deux adolescents et un Britannique, qui était le conseiller sécurité d’une équipe de journalistes allemands.

Le ministère russe de la Défense qualifie les frappes sur Kharkiv de « réponse au bombardement de Belgorod » et affirme, comme à son habitude, que ce sont des « centres de décision et des installations militaires » qui ont été visées. Il reconnait avoir ciblé ce qu’il désigne par un « ancien complexe hôtelier », le Kharkiv Palace, mais assure que s’y trouvaient des membres des renseignements militaires et des forces armées ukrainiennes « impliqués » dans l’attaque de Belgorod, ainsi que des « mercenaires étrangers ».

Samedi, la Russie avait assuré qu’elle ne laisserait pas « impunie » l’attaque de missiles et de roquettes contre Belgorod, située à une trentaine de kilomètres de la frontière ukrainienne.

La riposte russe après les frappes sur Belgorod

Après les frappes de samedi sur Belgorod, la réaction politique des autorités russes s’est faite, comme souvent, en plusieurs étapes, rapporte notre correspondant à Moscou, Jean-Didier Revoin. Le ministère des Affaires étrangères a dénoncé un « acte terroriste » de la part de Kiev, qualifiant du même terme le mode opératoire des autorités ukrainiennes. Le Kremlin a fait savoir que Vladimir Poutine avait dépêché des équipes du ministère des Situations d’urgence dans cette ville frontalière de l’Ukraine pour venir en aide aux victimes. Le ministère de la Défense a pour sa part annoncé que cette attaque ne resterait pas impunie, laissant présager d’une réaction qui, pour l’heure, n’a pas encore eu lieu de façon massive.

Sur cette photo tirée d’une vidéo publiée par la chaîne Telegram du ministère russe des Situations d’urgence, samedi 30 décembre 2023, des sauveteurs transportent une personne blessée après un bombardement à Belgorod, en Russie. AP+

Et enfin, au plan international, Moscou a réclamé une réunion d’urgence du Conseil de sécurité des Nations unies pour traiter de cette attaque.+

La Russie a convoqué cette réunion d’urgence pour demander aux membres du Conseil de sécurité de faire leur devoir et d’évaluer de manière objective ce qu’il s’est passé. C’est du moins l’explication officielle tandis que le ministère des Affaires étrangères affirme que Londres et Washington incitent Kiev à mener ce type d’attaque étant donné l’échec de la contre-offensive ukrainienne. On peut en déduire que ni Moscou ni Kiev n’ont l’intention de négocier quoi que ce soit. Et que l’escalade se poursuivra.

En Ukraine, pas de réaction au plus haut niveau de l’État

À Kiev, les Ukrainiens se méfient de la teneur du récit russe, explique notre correspondant Stéphane Siohan. À la veille du Nouvel an, et au lendemain d’une journée (vendredi) éprouvante de bombardements, la nouvelle de missiles tombant sur Belgorod n’a pas fait la une en Ukraine, même si l’information a provoqué un certain nombre de commentaires sur les réseaux sociaux, estimant en substance que la guerre revient toujours à la maison, c’est à dire chez celui qui l’a commencée…

Samedi soir, l’article le plus lu sur le site d’information Ukrainska Pravda est consacré aux explosions dans le centre de Belgorod ; il reprend des sources au sein des forces ukrainiennes, qui déclarent que oui, l’Ukraine vise bel et bien un certain nombre de cibles, notamment militaires, sur le territoire de la Fédération de Russie, mais que dans ce cas précis, les explosions de Belgorod seraient le fait d’une « utilisation non professionnelle » de la défense anti-aérienne…

L’opinion existe en Ukraine que la Russie a peut-être elle-même provoqué cet incident, afin de pouvoir convoquer le Conseil de sécurité des Nations unies, et détourner les yeux de ce qu’elle a commis en Ukraine vendredi. Mais comme le déclare samedi un célèbre chroniqueur de Kiev, lui-même d’origine russe, c’est Poutine qui a déclenché la guerre, alors toutes les victimes, y compris celles de Belgorod, pèsent sur sa conscience et celle de ses sujets…

RFI