🇷🇺 Guerre en Ukraine: comment le «Z» est devenu le symbole du soutien aux forces russes

🇷🇺 Guerre en Ukraine: comment le «Z» est devenu le symbole du soutien aux forces russes

Apparue en premier lieu peinte en blanc sur les blindés russes entrant en Ukraine, la lettre « Z » est depuis devenue un symbole de ralliement pour les soutiens pro-russes de l’invasion de l’Ukraine, bien que sa signification reste encore contestée.

Depuis le 24 février et le début de l’invasion en Ukraine, c’est une lettre qui apparaît ci et là de façon récurrente sur le théâtre des opérations militaires. De nombreux observateurs ont pu voir ce « Z » peint à la peinture blanche sur les blindés russes entrant en Ukraine sans pouvoir en déterminer la signification exacte.

Il n’est cependant pas rare de voir de tels marquages sur les équipements militaires pour permettre de mieux les distinguer. L’armée américaine peignait par exemple des chevrons sur ses blindés lors de l’invasion de l’Irak. C’est d’ailleurs l’une des premières tentatives d’explication qui a été donnée à la signification de cette lettre « Z ». Une source militaire anonyme a notamment affirmé au tabloïd anglais The Sun qu’il était « crucial que toute force attaquante puisse être distinguée, en particulier depuis les airs où les forces russes ont aujourd’hui un contrôle total. Les Ukrainiens ont des chars et des véhicules très similaires. »

Le sigle Z peint sur abribus de Saint-Pétersbourg le 4 mars 2022. REUTERS – STAFF

« Pour la victoire »

Mais d’autres lettres ont également été remarquées sur des blindés russes comme le « V » et le « O ». D’après Michael Clarke, ancien directeur du think tank britannique RUSI, ces symboles pourraient être basés sur la localisation et indiquer l’objectif géographique de chaque unité. « S’ils ne servaient qu’à distinguer quels sont les véhicules russes des autres, l’utilisation d’un seul symbole suffirait, a-t-il déclaré à Sky NewsCe sont probablement des symboles qui déterminent dans quelle direction avance chaque unité, par exemple le nord-est ou le nord-ouest. » Une supposition appuyée par l’état-major de l’armée ukrainienne, qui a publié sur Twitter un document listant les différentes lettres utilisées par l’armée russe sur ses véhicules et la direction géographique qui leur serait associée.

D’autres interprétations de ces lettres ont également été avancées. Elles pourraient selon certains désigner le président ukrainien et les initiales de son nom complet : Volodymyr Oleksandrovytch Zelensky. Mais c’est finalement le ministre de la Défense russe, Sergueï Choïgou, qui a mis fin au suspense dimanche en affirmant que ce « Z » venait de la préposition « Za » que l’on retrouve dans la phrase « Za pobedu » qui signifie « Pour la victoire » en russe. L’information reste cependant à prendre avec précaution, car la signification des autres lettres n’a pas été explicitée.

Le « Z » se répand dans la société civile

Toujours est-il que si l’utilisation « Z » a d’abord commencé sur les théâtres militaires, elle se répand depuis plusieurs jours dans la société civile russe, où de nombreuses personnes s’affichent fièrement avec ce symbole sur les réseaux sociaux mais aussi dans l’espace public. Sur Twitter, le chercheur du Wilson Center de Washington, Kamil Galeev, rapporte que les véhicules arborant la lettre « Z » sur leur pare-brise dans les villes russes sont de plus en plus fréquents, nombreux sont aussi ceux à s’afficher avec des tee-shirts siglés du symbole. D’autres rajoutent également un « Z » dans leur nom sur les réseaux sociaux pour afficher leur soutien à la guerre en Ukraine.

Dernièrement, c’est Ivan Kuliak qui a suscité la polémique à la Coupe du monde de gymnastique à Doha. Le gymnaste russe qui s’est classé troisième à l’épreuve des barres parallèles a concouru avec un « Z » affiché sur son justaucorps. Sur le podium, il figurait ainsi aux côtés de l’Ukrainien Ilia Kovtun, médaillé d’or. Malgré une enquête ouverte par la Fédération internationale de gymnastique, l’athlète de 20 ans a reçu le soutien de Vassili Titov, le président de la fédération russe.

Un outil de propagande pour le Kremlin ?

Car ce symbole de soutien aux forces russes semble être en train de devenir un véritable outil de propagande pour le régime poutinien. Sur ses pages Instagram et Telegram, le ministère russe de la Défense est même allé jusqu’à décliner la lettre en plusieurs messages : « Za pobedu » (« pour la victoire »), « Za mir » (« pour la paix »), « Za pravdu » (« pour la vérité »), « Za rossiïou » (« pour la Russie »), associés à des images laissant transparaître une campagne de communication à destination du grand public. Des médias locaux ont aussi publié une photo prise du ciel d’une soixantaine d’enfants malades, leurs familles et des soignants formant un « Z » dans la cour enneigée de leur hospice situé à Kazan, au Tatarstan.

Maria Butina, qui avait été expulsée des États-Unis en 2019 – après avoir été condamnée pour des faits d’espionnage –, symbolise bien la dynamique qui entoure ce sigle « Z ». Le fil Instagram de cette jeune femme de 33 ans, élue députée à la Douma en octobre 2021 sous les couleurs du parti de Poutine, est rempli de photos la mettant en scène portant un tee-shirt noir siglé d’un « Z » blanc dès le 27 février, soit trois jours après le début de la guerre. Dans une vidéo, toujours vêtue de son tee-shirt noir, elle lance : « Faites votre travail les gars ! Nous serons toujours derrière vous ! ».  

Le « Z », qui apparaît désormais massivement dans l’espace public, est ainsi devenu un symbole de loyauté et d’allégeance au Kremlin. Des politiciens aux célébrités, en passant par certains influenceurs, chacun veut s’afficher avec son « Z ». Dans une société russe où la liberté d’expression et de la presse se réduisent un peu plus chaque jour, qui sait si ne pas porter ce symbole ne sera pas bientôt considéré comme un signe de déloyauté au régime de Vladimir Poutine.

Un panneau publicitaire marqué de la lettre «Z» et du slogan «Nous n’abandonnons pas les nôtres» en soutien à l’armée russe à Saint-Pétersbourg le 7 mars 2022. AFP – –