🇸🇳 Données personnelles: «TikTok doit respecter les règles sénégalaises»

🇸🇳 Données personnelles: «TikTok doit respecter les règles sénégalaises»

Au Sénégal, le Rassemblement des entreprises du secteur des technologies de l’information et de la communication (Restic) va déposer une plainte contre TikTok devant la Commission de protection des données personnelles du Sénégal, pour non-respect par le réseau social d’origine chinoise de la législation sur les données personnelles, notamment à propos des enfants et des mineurs. Entretien avec Moustapha Diakhaté, secrétaire général exécutif du Restic.

RFI : Pour quelles raisons portez-vous plainte contre TikTok et sa maison mère BytDance ? 

Moustapha Diakhaté : Nous sommes partis d’un constat extrêmement simple. TikTok se développe beaucoup au Sénégal, un marché extrêmement dynamique pour les réseaux sociaux. Tout récemment, on a vu que TikTok s’est développé sur un segment démographique bien particulier composé surtout d’enfants et d’adolescents. Vous savez que la moyenne d’âge au Sénégal tourne autour de 18-19 ans. TikTok intéresse des enfants, des adolescents et des jeunes entre 16 et 17 ans, jusqu’à 23-24 ans. Et nous pensons que souvent ces jeunes n’ont pas la maturité pour faire face à certains contenus auxquels ils sont exposés. C’est un souci majeur pour nous, d’abord en tant que professionnels du secteur, mais aussi en tant que parents.

Que reprochez-vous à ces contenus ?

Un certain nombre de contenus qui viennent de l’extérieur sont souvent très violents. Nous nous posons la question de savoir si nous devons laisser nos enfants être exposés à ces contenus. D’autres contenus sont tous simplement bannis par nos us et coutumes, ici au Sénégal et en Afrique. 

Lesquels, par exemple ? 

 Il y a des contenus à caractère sexuel et des contenus obscènes auxquels les enfants ne devraient pas être exposés.

Donc vous reprochez à TikTok un manque de modération de ces contenus pour le public sénégalais et le public adolescent ?

Disons surtout pour les enfants. Car au Sénégal, le public de TikTok est surtout un public enfant. C’est une plateforme à laquelle les enfants s’accrochent extrêmement vite. Et nous considérons cela comme un risque pour notre jeunesse. 

Vous relevez dans votre plainte, le fait qu’il y a aussi un risque de siphonnage des données des utilisateurs sénégalais…

Nous partageons la même inquiétude que les autres pays, que ce soit en Amérique ou en Europe. C’est d’ailleurs un phénomène qui ne se limite pas à TikTok., mais qui peut s’amplifier avec TikTok, car c’est le réseau social qui croît le plus rapidement dans nos pays. Il y a beaucoup de réseaux sociaux très actifs en Afrique qui recueillent énormément de données sur nous. Des images, des messages, etc. Et pour lesquelles nous n’avons pas de visibilité jusqu’à présent. Où se trouvent ces données ? Comment sont-elles conservées et stockées ? Donc nous voudrions que les réseaux sociaux en général et TikTok en particulier puissent s’ouvrir à nous, aux autorités officielles de ce pays, pour au moins clarifier ces mécanismes de stockage des données sur les enfants et les adolescents qui ouvrent des comptes dans ces réseaux. Et voir dans quelles conditions ces données sont préservées afin qu’elles ne puissent pas faire l’objet d’une utilisation autre à laquelle elles sont initialement destinées.

Demandez-vous à TikTok de conserver au Sénégal les données concernant les Sénégalais ?

Tout récemment au Sénégal, on a vu beaucoup d’initiatives privées investir dans les centres de données, ce que l’on appelle les data centers. Et je pense qu’il y a une opportunité pour ces plateformes de venir dans nos pays et de saisir ces opportunités. Je pense qu’ils doivent pouvoir contribuer à étoffer l’offre locale qui est déjà disponible.

Vous demandez aussi que TikTok fasse bénéficier les créateurs de contenus sénégalais du fonds de 250 millions d’euros mis en place. Expliquez-nous pourquoi.

Parmi nos membres, nous comptons beaucoup de travailleurs indépendants, des gens qui produisent du contenu, ces contenus sont diffusés sur TikTok et les autres réseaux sociaux. Malheureusement, pour pouvoir être payés, les gens sont obligés d’ouvrir des comptes en Europe, en Asie ou en Amérique. Depuis le Sénégal ou l’Afrique, ils ne peuvent pas bénéficier de ces mécanismes de rémunération. Or, leurs contenus sont visualisés par des millions d’usagers TikTok. Il faut que ces fonds soient mieux dotés et ouverts aux producteurs de contenus d’Afrique. Ce n’est pas parce qu’ils sont logés en Afrique que l’on ne doit pas les rémunérer.

RFI