PLAISIR et SOUFFRANCE, entre les deux notre cerveau balance
Comment le cerveau gère le plaisir et la douleur, c’est le sujet de cette recherche passionnante du Laboratoire de Cold Spring Harbor (CSHL, New York) qui décrypte les processus liés aux 2 principes clés qui guident nos choix : rechercher le plaisir et éviter la douleur. Les chercheurs se concentrent ici sur une zone spécifique du cerveau, le pallidum ventral, pour découvrir comment les neurones se répartissent le travail pour gérer ces 2 motivations opposées. Ces travaux, présentés dans la revue Neuron, confirment qu’un déséquilibre dans le traitement de ces deux principes « contraires » est bien à l’origine de nombreux troubles psychiatriques.
Les chercheurs ont travaillé, précisément, sur un centre de traitement clé de l’information, le pallidum ventral, du cerveau de souris. L’objectif était de mieux comprendre comment les neurones et les circuits neuronaux gèrent ces motivations comportementales opposées. La recherche révèle que différents types de neurones contrôlent la motivation « positive » et la motivation « négative », en envoyant des signaux opposés le long d’un circuit cérébral voué au traitement de la motivation. En fin de compte, l’équilibre de l’activité entre ces 2 groupes de cellules permet de déterminer si une personne est plutôt à la recherche d’expériences agréables ou plutôt dans l’évitement des expériences négatives.
Plutôt à la recherche du plaisir ou dans l’évitement de toute douleur ?
L’équilibre plaisir-douleur est perturbé en cas de trouble mental : au départ, l’auteur principal, le professeur Bo Li du CSHL a constaté, en pratique clinique, que l’équilibre entre ces 2 comportements est fréquemment perturbé chez les patients atteints de maladie mentale. Ainsi, les personnes souffrant de dépression peuvent cesser de faire des choses qui leur procuraient autrefois du plaisir, et les patients souffrant de troubles anxieux peuvent se renfermer à l’extrême pour éviter toute menace possible.
Le pallidum ventral est la zone clé du cerveau qui gère cette capacité à reconnaître et à évaluer les récompenses ou les sanctions possibles liées à certains comportements. Les chercheurs observent en effet une activité dans cette zone lorsque les animaux cherchent des récompenses, comme une gorgée d’eau, ou évitent une punition, comme une bouffée d’air gênante. Mais comment les différents types de neurones du pallidum ventral garantissent une réponse équilibrée aux signaux associés aux 2 types de motivation ? A l’aide de techniques de pointe, les chercheurs constatent que :
- les neurones qui utilisent le neurotransmetteur GABA pour amortir l’activité dans le circuit en jeu dans la motivation motivent les souris à rechercher une récompense ;
- les neurones qui utilisent le neurotransmetteur glutamate pour exciter le même circuit cérébral permettent d’éviter la sanction.
- dans des situations plus complexes, avec à la fois une perspective de récompense et un risque de sanction, les animaux se montrent bien capables de compromis : n équilibre se crée entre l’activité des 2 types de neurones. Mais lorsque les chercheurs modifient artificiellement cet équilibre dans le pallidum ventral en manipulant une classe de neurones ou l’autre, ils sont alors en mesure de modifier le comportement des animaux.
Cet équilibre entre plaisir et douleur ou récompense et punition est bien essentiel pour contrôler nos décisions et nos comportements. Et cet équilibre semble perturbé chez les personnes souffrant de troubles psychiatriques : « les anomalies de comportement chez les patients souffrant de dépression ou d’anxiété induite par le stress peuvent être causées par des changements dans ce circuit », confirment les chercheurs qui viennent en identifiant ces processus, d’ouvrir une nouvelle piste de recherche et de traitement de nombreux troubles mentaux caractérisés par des excès dans la recherche du plaisir ou l’évitement à tout prix des expériences pouvant être douloureuses.