Gaza: un ambitieux plan de reconstruction lancé par l’Égypte
C’est le moyen pour le pays d’Abdel Fattah al-Sissi de réaffirmer sur la scène internationale son rôle essentiel au Proche-Orient. Le Caire a promis de débloquer 500 millions de dollars pour Gaza. Une somme colossale pour l’Égypte.
Les télévisions égyptiennes se plaisent à diffuser des portraits du président Abdel Fattah al-Sissi qui ont fleuri à Gaza, rapporte notre correspondant au Caire, Alexandre Buccianti. En parvenant à établir une trêve entre le Hamas et Israël le 21 mai après onze jours d’une nouvelle guerre entre l’enclave palestinienne et Israël, le président égyptien a réussi à s’imposer comme un acteur régional incontournable auprès des Occidentaux, et surtout de son homologue américain Joe Biden, qui le critiquait encore récemment sur la situation des droits de l’homme dans le pays.
Cet activisme diplomatique égyptien pour régler ce conflit est venu couronner des efforts diplomatiques de longue haleine menés par Le Caire pour recouvrer son rôle régional, après des années de marginalisation diplomatique liée à l’instabilité politique ayant suivi le soulèvement populaire de 2011.
Pour consolider ce rôle retrouvé au-delà de la trêve, l’Égypte va débloquer 500 millions de dollars pour reconstruire l’enclave palestinienne, où vivent entassées quelque deux millions de personnes sous blocus israélien depuis près de quinze ans. À ce plan égyptien s’ajoute plusieurs centaines de millions de dollars de la part des pays du Golfe.
Ce sont les entreprises égyptiennes qui se chargeront de la reconstruction de Gaza. Ce qui permettra de surmonter les objections israéliennes à une reconstruction gérée par le Hamas. Le mouvement a mis en sourdine sa fibre islamiste et arrêté son soutien au Groupe État islamique du Sinaï égyptien. En 2017, le mouvement palestinien avait assuré qu’il prenait ses distances avec la confrérie des Frères musulmans, considérée comme « terroriste » par Le Caire.
Les entreprises détenues par l’armée, principales bénéficiaires
Avec ce plan, l’Égypte renoue enfin avec l’histoire, puisque c’est elle qui gérait Gaza de 1948 à 1967. Cet investissement massif sera également bénéfique pour l’économie égyptienne, surtout les entreprises détenues par l’armée, fortement représentées dans le secteur de la construction, un des principaux moteurs de la croissance.
L’Egypte a annoncé l’envoi d’engins de construction et d’équipes techniques à Gaza pour « déblayer les décombres » et préparer la reconstruction. Elle a également annoncé un « forum sur la reconstruction de Gaza » qui se déroule au Caire depuis jeudi 10 juin jusqu’à dimanche 13 juin. Il réunit responsables politiques et entrepreneurs privés de la région, sous l’égide du Premier ministre égyptien Mostafa Madbouli.
Malgré la pandémie de coronavirus, la croissance du PIB égyptien a atteint 3,6% en 2019-2020, selon les chiffres officiels. Mais près d’un tiers (29,7%) de ses 102 millions d’habitants vit sous le seuil de pauvreté.
RFI