Brésil : les trois chefs de l’armée présentent leur démission en pleine crise politique
Les chefs des trois forces de l’armée de l’air, de terre et de la marine brésilienne ont démissionné collectivement après l’éviction de leur ministre de tutelle pour une personnalité plus proche de Jair Bolsonaro.
Au Brésil, les principaux chefs militaires quittent leur poste, à la suite du ministre de la Défense. Les chefs des armées de l’air, de terre et de la marine vont devoir être remplacés par le président brésilien Jair Bolsonaro, qui subit de fortes pressions politiques en pleine crise sanitaire.
« Pour la première fois dans l’histoire, les chefs des trois forces de l’armée présentent leur démission collectivement, en désaccord avec un président », a relevé mardi 30 mars le quotidien Folha de Sao Paulo.
Le ministère de la Défense n’a pas précisé les raisons du départ des hauts gradés. Celui-ci a été annoncé à l’issue d’une réunion mardi à Brasilia, en présence du nouveau ministre de la Défense Walter Braga Netto et de son prédécesseur, Fernando Azevedo e Silva.
Selon la presse brésilienne, le départ surprise de Fernando Azevedo e Silva a été très mal vécu par les commandants des trois forces, le général Edson Pujol (armée de terre), l’amiral d’escadre Ilques Barbosa (marine) et le chef de l’armée de l’air Antonio Carlos Bermudes.
Des généraux mal à l’aise avec la méthode Bolsonaro
Dans le bref communiqué annonçant qu’il quittait son poste de ministre, le général Fernando Azevedo e Silva, ancien chef d’État-major, avait assuré lundi avoir été « entièrement loyal » au président Bolsonaro. Mais il avait aussi rappelé l’importance de « préserver l’armée comme une institution d’État », une phrase relevée par tous les commentateurs.
Pour Merval Pereira, chroniqueur politique du quotidien O Globo, le ministre sortant était « mal à l’aise quand Bolsonaro utilisait l’armée à des fins politiques ». Ce malaise était aussi prégnant chez les principaux chefs militaires, notamment le commandant de l’armée de terre, le général Edson Pujol.
En mai 2020, alors que la crise sanitaire du Covid-19 commençait à prendre de graves proportions au Brésil, le président avait voulu lui serrer la main lors d’une cérémonie officielle, mais il avait préféré lui tendre le coude, suivant les recommandations sanitaires pour éviter les contaminations.
Un remaniement pour renforcer le contrôle sur l’armée ?
De nombreux généraux désapprouvent également l’attitude de militants bolsonaristes nostalgiques de la dictature militaire (1964-1985), qui avaient réclamé l’an dernier une « intervention » de l’armée contre le Parlement et la Cour suprême.
La plupart des analystes estiment que le remaniement ministériel avait justement pour but de renforcer son contrôle sur l’armée, qui occupe un tiers des portefeuilles de son gouvernement et de nombreux postes dans l’administration.
Mais le vice-président Hamilton Mourao, lui aussi général, a tenu à assurer qu’il n’y avait aucun risque de « rupture institutionnelle ».
Au total, six ministres ont été remplacés lundi, y compris ceux de la Justice et des Affaires Etangères.
Le président Bolsonaro est plus que jamais sous le feu des critiques en raison de sa gestion chaotique de la crise sanitaire qui a fait plus de 313 000 morts au Brésil.
France 24 avec AFP