📡 L’antenne 4G accusée de tuer des vaches ne sera pas débranchée
Le Conseil d’État a tranché. Il annule l’ordonnance du juge des référés qui prévoyait l’arrêt du relais de téléphonie mobile.
Le coup est rude pour Frédéric Salgues. Il espérait de tout cœur être entendu, avec à la clef, l’arrêt d’une antenne 4G. L’agriculteur de Mazeyrat d’Allier (Haute-Loire) pensait pourtant obtenir gain de cause dans le bras de fer qui l’oppose aux quatre opérateurs mobiles Bouygues Telecom, Free, Orange et SFR ainsi qu’au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Le conseil d’État a tranché, annulant l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 23 mai 2022. Cette première décision de justice prévoyait l’arrêt d’une antenne 4G pendant deux mois. Il n’en sera finalement rien. «Quand on a tout perdu, on ne risque plus rien, s’emporte Frédéric Salgues, à bout et remonté contre les élus locaux et plus particulièrement, Laurant Wauquiez. On laisse crever des vaches. L’antenne va s’arrêter!». Il attend encore la remise d’un rapport d’un expert le 13 septembre, et est bien décidé «à ne pas mourir en silence».
Les faits remontent à plus d’un an, quand, dans le cadre du plan de lutte contre les zones blanches, le New Deal Mobile, le responsable du Gaec de Coupet accepte qu’une antenne relais soit installée sur ses terres. Elle apporte la connexion 3G/4G quelque 450 personnes. Frédéric Salgues pensait «arranger tout le monde» en acceptant cette installation. Mais, l’histoire vire au cauchemar pour l’éleveur, quand ses bêtes commencent à tomber malades les unes après les autres. Frédéric Salgues estime avoir perdu plus de vingt génisses, et près de trente veaux depuis la mise en service de l’antenne. Soit un quart de son cheptel en dix-huit mois. Fait troublant, les animaux refusent de stationner dans certaines parties du bâtiment pour se regrouper dans un seul point. La production de lait s’effondre. Acculé financièrement l’exploitant cherche une issue.
Détresse de l’éleveur
Il se tourne vers la Mairie, la préfecture, la chambre d’agriculture, multiplie les dépenses, sollicite des vétérinaires, voit des électriciens mener une expertise sur son exploitation et finalement, des géobiologistes – anciennement plus connus sous le nom de sourciers. Ce sont ces derniers qui pointent la responsabilité de l’antenne dans la maladie des animaux. Pour eux, des failles et des veines d’eau passent à proximité du relais télécoms et sous les bâtiments de l’exploitation. Elles établissent «une connexion entre l’antenne et le bâtiment (…) cela met les muscles des bêtes en tension et les rend plus sensibles aux bactéries et aux virus», explique Olivier Ranchy, salarié de la chambre d’agriculture des Pays de la Loire. L’argument porte. Frédéric Salgues en est désormais convaincu, il faut débrancher le site de téléphonie mobile pour que tout rentre dans l’ordre. Il attaque les opérateurs en justice.
Le 23 mai, il obtient gain de cause, du moins, il le croit, avec la décision du Tribunal administratif. Les opérateurs saisissent le Conseil d’État. Qui vient de statuer. Il estime notamment que «le juge des référés, qui n’a, par ailleurs, pas caractérisé l’existence d’un péril grave susceptible de justifier le prononcé d’une mesure sur le fondement de ces dispositions, a commis une erreur de droit».
La difficulté de ce dossier est accentuée par la détresse de l’éleveur. Pour autant, les opérateurs télécoms ne veulent pas céder, ni laisser s’installer des doutes qui ne reposent sur aucune étude scientifique. «Aucune étude d’impact» ne démontre un lien entre les faits qui se produisent au Gaec du Coupet et la mise en fonctionnement du relais. Ils ne veulent pas non plus prendre le risque de voir les recours de ce type se multiplier sur tout le territoire. «Une étude d’impact pourrait apporter des éléments rationnels au dossier», glisse un expert du secteur. La balle est désormais dans le camp des autorités.
Le Figaro