👥️️ Addiction, interdiction, espionnage: les déboires de l’application TikTok
Le site chinois de vidéos ultra-courtes TikTok, critiqué pour son aspect “addictif” pour les jeunes, va mettre en place dans quelques semaines, par défaut, un avertissement au bout de 60 minutes d’utilisation pour tous ceux qui ont déclaré avoir moins de 18 ans. Mercredi, le Parlement européen a décidé d’interdire le réseau social sur les appareils professionnels de l’institution, invoquant des inquiétudes en matière de sécurité des données, après une mesure similaire de la Commission européenne, au Danemark et aux États-Unis.
Voir aussi : 🇺🇸 Nouvelle étape clef pour un projet de loi visant à interdire TikTok aux États-Unis
Le mineur devra saisir un mot de passe pour continuer à regarder le site, a annoncé TikTok dans un communiqué.
S’ils ont un jumelage familial des comptes, les parents pourront “définir un temps d’écran quotidien maximal de leur adolescent” “en fonction des jours de la semaine”, indique TikTok.
Les jeunes peuvent toujours, cependant, désactiver la fonction ou mentir sur leur âge, comme sur les autres sites internet.
Cette nouvelle fonctionnalité, qui complète des avertissements déjà existants, vise à répondre à ceux qui critiquent l’explosion du temps passé sur l’appli par les 4-18 ans, happés par le défilement ininterrompu de vidéos proposées par des algorithmes qui analysent leurs goûts. Selon une récente étude mondiale de Qustodio, en 2022, les mineurs ont passé en moyenne 1h47 par jour sur TikTok.
“Ça ne sert à rien”
“Mettre des messages pour dire ‘vous avez passé tant de temps’, ce n’est pas suffisant, c’est une façade, ça ne sert à rien! Il faut juste arrêter de faire des contenus addictifs et réduire l’addiction en faisant autre chose sur les vidéos”, avait protesté Alexandra, une jeune invitée à un débat organisé à Bercy pour l’Internet Safer Day.
La version chinoise de TikTok, baptisée Douyin, est limitée pour les moins de 14 ans à 40 minutes par jour et leur est inaccessible entre 22 heures et 6 heures du matin.
“Nombreuses dérives”
La secrétaire d’État française à l’Enfance Charlotte Caubel avait mis en cause TikTok dans un tweet le 23 février. “La Commission européenne demande à ses salariés de supprimer TikTok. Cela doit nous interroger aussi pour nos enfants. L’application est sujette à de nombreuses dérives: pincements au visage, désinformation… il ne faut pas sous-estimer son impact”.
“Cette proposition va dans le bon sens, mais ne répond pas à l’ensemble de nos inquiétudes, notamment sur ce qui concerne la protection des données des utilisateurs et la teneur des contenus accessibles pour nos enfants”, a-t-elle réagi mercredi, jugeant qu’un “dialogue ferme et engagé avec les plateformes est le seul moyen de protéger nos enfants sur internet”.
Transferts de données
TikTok est aussi mis en cause pour des soupçons de transfert de données vers la Chine, qui ont amené plusieurs gouvernements européens et américains à décider d’interdire l’appli sur les téléphones des agents publics.
En effet, ce mercredi, le Parlement européen a décidé d’interdire le réseau social chinois TikTok sur les appareils professionnels de l’institution, invoquant des inquiétudes en matière de sécurité des données, après une mesure similaire de la Commission européenne.
La présidente du Parlement, Roberta Metsola, et le secrétaire général, Alessandro Chiocchetti, ont décidé que l’application TikTok ne pourrait plus être utilisée sur les appareils professionnels, comme les ordinateurs, téléphones mobiles ou tablettes, à compter du 20 mars.
“À cette date, l’accès internet au réseau social depuis les ordinateurs du Parlement sera bloqué”, a-t-il été précisé dans un courrier rendu public mardi soir, diffusé par la Direction générale de l’innovation et du support technologique (DG ITEC) du Parlement à l’attention de ses quelque 8.000 fonctionnaires et agents.
Par ailleurs, il est aussi “fortement” recommandé aux salariés de l’institution ainsi qu’aux élus et assistants parlementaires de retirer TikTok de leurs appareils personnels.
La Commission européenne avait annoncé jeudi dernier que son personnel avait jusqu’au 15 mars au plus tard pour désinstaller l’application. Une mesure similaire doit être prise par le Conseil européen, l’instance représentant les 27 Etats membres.
“Égalité de traitement”
Un porte-parole de Tiktok a estimé mercredi que ces décisions étaient “malavisées et fondées sur des idées fausses (…) sur des craintes plutôt que des faits”. Le groupe réclame “une procédure régulière et une égalité de traitement” avec les autres entreprises du secteur.
Ces interdictions surviennent alors que TikTok, dont la société mère ByteDance est chinoise, fait l’objet d’une surveillance croissante des Occidentaux en raison de craintes que Pékin puisse accéder aux données des utilisateurs à travers le monde.
Menace à la sécurité nationale
Aux États-Unis, la Maison Blanche a ordonné lundi aux agences fédérales américaines de bannir TikTok de leurs appareils sous 30 jours.
Une vingtaine d’États américains ont déjà pris une mesure de ce type pour leurs propres employés. Et, au Congrès, un projet de loi en discussion pourrait même aboutir à l’interdiction totale de l’application aux Etats-Unis.
Les législateurs américains considèrent l’application comme une menace à la sécurité nationale.
Depuis mardi, le gouvernement canadien interdit TikTok sur les appareils mobiles qu’il fournit à son personnel, évoquant “un niveau de risque inacceptable” pour la vie privée et la sécurité.
Dans l’UE, ByteDance fait l’objet d’une enquête de l’autorité irlandaise de protection de la vie privée, qui le soupçonne d’enfreindre la législation européenne sur la protection des données (RGPD) en matière de traitement des données personnelles des enfants et de transferts de données vers la Chine.
Le Parlement danois a annoncé mardi avoir demandé aux députés et à l’ensemble de ses personnels de bannir l’application TikTok des appareils mobiles qu’il fournit.
TikTok avait reconnu en novembre que certains employés en Chine pouvaient accéder aux données d’utilisateurs européens, et avait admis en décembre que des employés avaient utilisé ces données pour traquer des journalistes.
Mais le groupe nie farouchement tout contrôle ou accès du gouvernement chinois à ses données.
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