🌍 Le monde se dirige vers un excédent de pétrole et de gaz: bonne nouvelle en vue à la pompe?

🌍 Le monde se dirige vers un excédent de pétrole et de gaz: bonne nouvelle en vue à la pompe?

Nous nous dirigeons vers “un monde énergétique très différent”, avec un surplus conséquent de pétrole et de gaz par rapport à notre consommation d’énergies fossiles. C’est en tout cas la conclusion de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), dans son rapport intitulé World Energy Outlook. Un document de 398 pages qui explore les tendances énergétiques mondiales à l’horizon 2030. D’où vient soudainement cet surplus? Et qu’est-ce que ça implique, jusqu’au consommateur? Cinq points pour y répondre.

D’où vient cette soudaine abondance de gaz et de pétrole?

Au cours des dernières décennies, la Chine a été le moteur de la hausse de la demande en pétrole. Un moteur qui se tourne maintenant rapidement vers l’électricité, en particulier pour le transport routier. Les véhicules électriques (VE) à bas prix – dont une grande partie provient de fabricants chinois – sont en train de conquérir bon nombre de marchés, et pas seulement dans l’Empire du Milieu. Ces véhicules électriques représentent actuellement environ 20 % des ventes mondiales de voitures neuves. Et même s’il est plus difficile de prévoir son avenir à court terme, dans le scénario de l’AIE, cette part devrait atteindre près de 50 % d’ici 2030. De quoi réduire la demande en pétrole d’environ 6 millions de barils par jour.

Cette baisse de la demande est partiellement compensée par une augmentation de l’utilisation du pétrole comme matière première dans l’industrie pétrochimique. Ainsi que par la demande croissante en Inde, qui atteindra presque 2 millions de barils par jour d’ici 2035. Mais dans l’ensemble, on assiste à un ralentissement de la demande en pétrole et à un excédent de capacité de production, qui devrait atteindre 8 millions de barils par jour d’ici 2030.

Une voiture électrique de Polestar, qui fait partie du groupe automobile chinois Geely. © ANP

En ce qui concerne le gaz, la capacité mondiale d’exportation de GNL (gaz naturel liquéfié) devrait augmenter de près de 50 % au cours des cinq prochaines années, avec les États-Unis et le Qatar en tête de la production. Si les quelque 270 milliards de mètres cubes de nouvelle capacité de GNL sont livrés selon les calendriers annoncés, cela représentera une hausse considérable de l’offre mondiale, à l’horizon 2030. Mais les prix de nombreux fournisseurs resteront élevés, afin de rentabiliser ces investissements en infrastructures. Des tarifs sans doute trop élevés pour inciter les pays émergents à opter pour la transition et à importer massivement cette source d’énergie. Ce qui créera, à nouveau, une offre trop importante par rapport à la demande.

La guerre au Moyen-Orient pourrait-elle bouleverser ces prévisions?

L’AIE se montre très prudente à ce sujet. “Le risque de perturbation de l’approvisionnement en pétrole et en gaz est élevé en raison du conflit au Moyen-Orient, a reconnu son directeur, Fatih Birol. Environ 20 % des réserves mondiales de pétrole et de gaz naturel liquéfié (GNL) transitent par le détroit d’Hormuz, un point de passage maritime crucial (NDLR: au large de l’Iran, à l’entrée du golfe Persique). Les risques géopolitiques y sont et resteront élevés.”

Est-ce une bonne nouvelle pour notre économie?

Certainement. L’AIE prévoit des prix du pétrole autour de 75 à 80 dollars par baril pour les cinq prochaines années, ce qui est légèrement moins cher qu’actuellement, et des prix plus bas sont toujours bénéfiques pour l’économie.

La baisse des prix du gaz contribuera à restaurer quelque peu la compétitivité malmenée de l’industrie européenne. “Les coûts élevés de l’électricité dans de nombreux États membres de l’UE sont dus aux coûts des combustibles fossiles utilisés dans la production d’électricité, y compris l’importation de gaz naturel. Cela représente environ un quart des coûts de l’électricité dans l’Union européenne”, note l’AIE.

En 2022, près d’une personne sur dix dans l’Union européenne, soit plus de 40 millions de personnes, n’était pas en mesure de chauffer convenable­ment son logement

La baisse des prix de l’énergie signifie également un soulagement financier pour les consommateurs, qui ont été durement touchés par les pics des tarifs Durant la crise énergétique de 2022. Près d’un Européen sur dix – soit plus de 40 millions de personnes – n’était plus en mesure de chauffer correctement son logement, alarmait la Commission européenne.

Uhamp pétrolier de Gazprom près de Novoprovskoye, dans le nord de la Russie. © afp

C’est donc une bonne nouvelle pour notre portefeuille?

Oui, mais c’est à relativiser. À partir de 2027, la résolution européenne ETS2 entrera en vigueur. Il s’agit de l’extension d’un système déjà en place pour les grandes entreprises, visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre grâce à un système d’échange de droits d’émission. Dans le scénario le plus pessimiste calculé par Brafco, la fédération des fournisseurs de carburant et de mazout, cela entraînerait une augmentation de 16,30 centimes par litre d’essence, 18,42 centimes pour le diesel et 18,96 centimes pour le mazout. L’Europe a toutefois prévu un mécanisme de stabilisation des prix pour limiter les coûts pour les ménages. Si les prix devaient s’envoler lors du lancement du mécanisme en 2027, celui-ci pourrait être reporté.

La résolution ETS2 pourrait finalement rendre le mazout de chauffage un peu plus cher. © BELGA

N’est-ce pas un mauvais signal, alors que nous sommes censés réduire notre dépendance aux énergies fossiles et réduire nos émissions de CO2?

Selon l’AIE, l’un n’exclut pas nécessairement l’autre. Des prix des carburants à la baisse pourraient justement offrir aux décideurs politiques une marge pour accroître les investissements dans la transition énergétique et réduire les subventions aux combustibles fossiles. À l’échelle mondiale, indique l’AIE dans son rapport, l’augmentation du nombre de véhicules électriques au cours de cette décennie entraînera un point culminant de la demande en charbon, pétrole et gaz pour produire suffisamment d’électricité. Les émissions de carbone commenceront ensuite à diminuer. Toutefois, l’Agence avertit que le monde est “encore loin d’une trajectoire compatible avec les objectifs climatiques”.

L’Accord de Paris sur le climat de 2015 visait à limiter le réchauffement climatique à un maximum de 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Selon le rapport, le monde est plutôt sur le chemin d’augmentation de la température de 2,4 °C d’ici la fin du siècle.

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