🌍 Il suffirait de quelques navires russes ou chinois bien placés pour couper l’internet mondial

🌍 Il suffirait de quelques navires russes ou chinois bien placés pour couper l’internet mondial

Alors que les affaires d’espionnage, voire de sabotage, se multiplient et pointent généralement vers la Russie, les pays de l’OTAN et du G7 s’inquiètent: leurs infrastructures stratégiques paraissent bien trop vulnérables. En particulier les structures sous-marines, comme les câbles ou les pipe-lines. Or, les coupures se sont multipliées, ces dernières années, avec à chaque fois un très gros doute sur leur caractère accidentel.

Il y a bien sûr eu l’explosion des gazoducs Nord Stream en 2022, apparemment un sabotage – des traces d’explosifs ont été retrouvés – mais l’enquête est toujours en cours. Dans la même région, le gazoduc Balticonnector et à un câble de communication voisin ont ensuite été coupés, sans doute par l’ancre d’un navire. Là encore, rien n’est sûr, mais un navire chinois a échangé son équipage dans l’enclave russe de Kaliningrad, rappelle The Economist, avant de passer par là. Puis d’arriver dans le port russe d’Arkhangelsk sans son ancre.

Un enjeu qui dépasse des eaux occidentales: en mars dernier, les câbles de communication internet passant par la mer Rouge ont été coupés. Ils ont vraisemblablement été endommagés par le naufrage du Rubymar, un cargo frappé par un missile houthi qui a fini par sombrer.

Une flottille de navire espions dans l’Atlantique

Même si, cette fois, ça n’était vraisemblablement pas intentionnel, ce cas démontre à quel point les câbles sous-marins sont vulnérables, même à plusieurs centaines de mètres de profondeur. Or, il y a en plus de 600, qui totalisent 1,4 million de kilomètres, détaille le média britannique, et assurent le transfert des données de l’internet mondial. Et donc aussi des communications, celles des particuliers comme des nations, mais aussi les flux boursiers et toutes les autres données qui doivent circuler instantanément pour que notre monde fonctionne. Une proie très tentante pour des puissances hostiles.

Or, la Russie a beaucoup investi dans des capacités de sabotage sous-marin. Cela fait des années que les états-majors de l’OTAN, et surtout de Grande-Bretagne et des pays nordiques, s’alarment des activités de navires suspects. Parfois camouflés en bâtiments de recherche scientifiques, ceux-ci ont la fâcheuse tendance à couper leur localisation GPS à proximité des éoliennes offshore et des gazoducs, selon la marine norvégienne, qui rappelait que certains de ces navires sont équipés de minisubmersibles. Elle suspecte une cartographie de la zone par les Russes.

L’année dernière, ça n’est pas moins d’une cinquantaine de navires qui étaient suspectés de collecter des renseignements sur les parcs éoliens, les gazoducs et les câbles transportant de l’électricité et des données dans l’Atlantique nord. Un journaliste danois s’était approché d’un de ces bâtiments, l’Amiral Vladimirsky, supposé faire de la recherche océanographique. Et il avait été dissuadé de continuer par un homme en arme.

8 coupures de câbles “suspectes”

Saboter les infrastructures énergétiques européennes causerait une nouvelle crise de l’approvisionnement, tout en restant, en principe, assez discret pour rester sous le seuil de la guerre ouverte, pour les Russes. Mais couper les câbles internet pourrait causer un vrai crash économique tout en limitant les communications entre pays de l’OTAN. Policy Exchange, un groupe de réflexion à Londres, estime que depuis 2021, il y avait eu huit coupures de câbles “non attribuées, mais suspectes”, et plus de 70 observations de navires russes au comportement inquiétant à proximité de leur tracé.

Une inquiétude qui ne se limite pas à l’Atlantique, où le nombre de câbles (17 entre les USA et l’Europe) limiterait les effets d’une seule grande coupure. Mais en Asie, où les redondances de connexion sont moins nombreuses, il est probable que la Chine étudie aussi cette option à l’encontre du Japon, des Philippines, et surtout de Taïwan. En cas d’attaque, Pékin commencerait vraisemblablement par isoler l’île de ses alliés et “couper les câbles serait presque certainement une composante de cette campagne”, estime le think tank américain CNAS de Washington.

Taïwan coupée de ses alliés?

En outre, selon The Economist, un tel sabotage rendrait les drones américains inopérants, de même que les réseaux de surveillance basés sur l’internet. Il leur faudrait se rabattre sur des connexions satellites, moins efficaces et qui devraient être déployées en urgence. Même si des réseaux comme Starlink pourraient constituer une parade, au moins partielle.

En coordonnant des coupures en différents endroits stratégiques, Chine et Russie pourraient gravement perturber la coopération entre Washington et ses alliés d’Europe ou d’Asie en recréant un vrai “brouillard de guerre”, sans parler des effets économiques. D’autant plus qu’il n’y a pas plus d’une soixantaine de navires réparateurs de câbles dans le monde, déjà fort occupés par la maintenance normale. Et eux-mêmes très vulnérables.

Les patrouilles se multiplient autour des infrastructures et le long des tracés des câbles. En mai dernier, l’OTAN a évoqué une liste des infrastructures critiques commune aux pays membres afin d’assurer une meilleure collaboration. Voire un “concept d’océan numérique” avec des surveillances électroniques et par drones. Mais c’est là jouer en réaction à des coups que le Kremlin semble préparer depuis des années.

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