🇺🇸 États-Unis: Joe Biden pris dans la tourmente déclenchée par la Cour suprême

🇺🇸 États-Unis: Joe Biden pris dans la tourmente déclenchée par la Cour suprême

Depuis son élection, le président américain enchaîne les crises : relance post-Covid, inflation, problèmes d’approvisionnement, crise du lait pour bébé et maintenant le droit à l’avortement après la libéralisation des armes à feu par la Cour suprême. Et même lorsqu’il décroche quelques victoires, elles ont toujours un goût amer. 

Cela devait être un jour de célébration. En signant, samedi 24 juin, le texte de loi bipartisan sur le contrôle des armes à feu, Joe Biden a salué un pas monumental. Il s’agit de la plus importante législation en matière d’armes depuis près de 30 ans.

Mais, face au président américain, les journalistes présents lors de la cérémonie avaient uniquement des questions sur la décision de la Cour suprême de révoquer le droit à l’avortement.

La loi sur les armes est éclipsée par ce séisme. Au point que l’un des proches de Joe Biden a laissé entendre que le timing de la Cour suprême n’est peut-être pas un simple hasard. Surtout alors que cette même Cour a annulé des restrictions sur le port d’arme dans l’État de New York

Quoi qu’il en soit, tout cela n’arrange pas la popularité de Joe Biden, en baisse pour la quatrième semaine consécutive. Elle est désormais au plus bas depuis son élection : 36%. Une situation qui selon les experts pourrait avoir des conséquences sur l’issue des élections de mi-mandat en novembre prochain.

Les New Yorkais mécontents de l’État fédéral

Au-delà du sondage, la colère se mesure désormais dans la rue, au lendemain de la décision de la Cour suprême de révoquer le droit à l’avortement. La colère des manifestants qui y sont favorables ne retombe pas. Mais s’ils sont clairement en colère contre les magistrats de la Cour, ils le sont aussi contre le système en place et les démocrates, Joe Biden en tête.

« On nous retire nos droits à la santé », s’insurge ainsi Sharmin Hussain, qui travaille dans une clinique abortive de New York. Elle confie sa frustration face aux réponses de Joe Biden, surtout lorsqu’il explique que la solution est de voter en masse pour les démocrates aux élections de mi-mandat.

« La majorité des gens qui sont pour le droit à l’avortement ont voté pour lui ! Nous dire de voter, c’est nous faire croire que les élus défendent vraiment nos droits, alors que ces mêmes élus dans les États républicains sont en train de limiter nos droits au vote, là maintenant ! Comment ose-il nous dire que nous sommes responsables d’un système politique qui est en réalité pensé pour nous enlever le droit de participer à la démocratie ! »

Cependant, cela pourrait tout de même se retourner contre le camp républicain dans les urnes, analyse Lauric Henneton, maitre de Conférence à l’Université de Versailles-Saint-Quentin et spécialiste des États-Unis. « Les démocrates se lancent dans un effort de mobilisation sans précédent. Avec le fait que l’arrêt de la Cour suprême soit totalement contraire à l’état de l’opinion, on va avoir des tas de démocrates qui vont être encore plus motivés que jamais pour voter. Mais surtout, tous les électeurs du « milieu »: les indépendants, les modérés, tous ceux qui pour de raisons fiscales ou économiques pourraient fermer les yeux sur le sociétal et voter républicain quand même, là, l’avortement est une ligne rouge pour un certain nombre de ces gens. Et ils sont des électeurs décisifs dans des élections de plus en plus serrées, et ça pourrait coûter très cher aux États républicains qui pourraient ne récupérer ni le Sénat ni la Chambre comme ils s’y attendent parce que les électeurs leur feraient payer cet arrêt-là. »

En outre, pour les manifestants pro-avortement, Joe Biden pourrait être plus agressif : faire par exemple des bâtiments fédéraux des sanctuaires pour l’avortement dans les États conservateurs. D’autres suggèrent de réformer les systèmes de pouvoir en place. « Il pourrait nommer plus de juges à la Cour suprême ! Sinon, il va falloir mettre la pression sur le Congrès et les élus de chaque État pour faire en sorte d’avoir des lois moins conservatrices sur l’avortement », suggère cette femme.

Une Cour suprême politisée

Et il n’y a pas que les manifestants qui estiment que le président pourrait faire plus. Deux sénatrices, Elizabeth Warren et Tina Smith appellent Joe Biden à déclarer une situation d’urgence sanitaire pour débloquer les fonds nécessaires pour faire face à la décision de la Cour suprême.

« La Cour suprême est de plus en plus à contre-courant de l’opinion, on l’a vu encore il y a quelques jours avec un arrêt sur les armes à feu, souligne  Ils en ont parfaitement conscience, mais ils disent que leur travail n’est de suivre l’opinion, c’est de dire le droit. Mais ils disent le droit à leur façon : ce sont des juges politisés, d’un côté comme de l’autre. »

RFI