🇺🇸 Des comptes Twitter de journalistes suspendus: l’Europe menace Elon Musk de sanctions

🇺🇸 Des comptes Twitter de journalistes suspendus: l’Europe menace Elon Musk de sanctions

La vice-présidente de la Commission européenne, Vera Jourova, a jugé vendredi “inquiétante” la suspension par Twitter de comptes de journalistes et averti le patron du réseau social, Elon Musk, qu’il y aurait “bientôt” des “sanctions” applicables dans le cadre de la nouvelle législation européenne.

« Les nouvelles concernant la suspension arbitraire de journalistes sur Twitter sont inquiétantes », a tweeté la responsable, chargée des valeurs et de la transparence au sein de l’exécutif européen. Elle a rappelé que la loi sur les services numériques –qui devrait s’appliquer aux géants de la tech à l’été prochain– « exige le respect de la liberté des médias et des droits fondamentaux ». « Elon Musk devrait en être conscient. Il y a des lignes rouges. Et des sanctions, bientôt », a-t-elle dit. Elle a aussi affirmé que le Media Freedom Act, un projet de règlement actuellement en discussion destiné à protéger la liberté de la presse et le pluralisme des médias, renforcerait la législation européenne.

“La liberté de la presse ne doit pas être activée et désactivée à convenance”

Le ministère allemand des Affaires étrangères a également manifesté son inquiétude. “La liberté de la presse ne doit pas être activée et désactivée à convenance”, écrit le ministère sur son compte Twitter, au-dessus d’une capture d’écran des comptes suspendus. “Pour cette raison, nous avons un problème avec Twitter”, ajoute la diplomatie allemande.

Des comptes de journalistes suspendus

Une douzaine de journalistes américains ont été suspendus du réseau social. Parmi eux, des employés de médias comme CNN (Donie O’Sullivan), le New York Times (Ryan Mac), le Washington Post (Drew Harwell) et des journalistes indépendants. Certains avaient tweeté à propos de la décision prise mercredi par Twitter de suspendre le compte qui rapportait automatiquement les trajets du jet privé d’Elon Musk.

Les justifications d’Elon Musk

Twitter n’a pas précisé pourquoi ces comptes avaient été suspendus, ni la durée de leur suspension. Elon Musk, propriétaire du réseau social depuis son rachat en octobre, a toutefois donné quelques indications. “Les comptes impliqués dans du doxing reçoivent une suspension temporaire de 7 jours”, a-t-il en effet tweeté dans la nuit de jeudi à vendredi, en indiquant que ces règles s’appliquaient “aux journalistes (avec des guillemets, ndlr) comme à n’importe qui d’autre”. Le terme “doxing” signifie divulguer publiquement sur internet des informations personnelles relatives à un individu, sans son accord. “Ils ont posté ma position géographique exacte en temps réel, c’est-à-dire littéralement les coordonnées permettant un assassinat, en violation directe (et évidente) des conditions d’utilisation de Twitter”, a également assuré Musk.

Un “dangereux précédent”

“Nous sommes très perturbés par la suspension arbitraire de comptes de journalistes vue sur Twitter. Les voix des médias ne doivent pas être placées sous silence sur une plateforme qui professe qu’elle est un espace de liberté (…) La décision crée un dangereux précédent à un moment où les journalistes partout dans le monde sont confrontés à la censure, des menaces physiques et même pire”, a tonné Stéphane Dujarric, le porte-parole du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres.

Le compte @ElonJet suspendu

Au départ de cette histoire, Elon Musk avait tweeté mercredi qu’une voiture à Los Angeles avec un de ses enfants à bord avait été suivie par “un harceleur cinglé”, et semblait pointer du doigt le suivi de son jet privé comme en étant la raison. Il annonçait dans ce tweet qu’il allait poursuivre en justice la personne derrière le compte @ElonJet, désormais suspendu. Créé par un étudiant et suivi par environ 500.000 personnes, @ElonJet utilisait les données publiques pour indiquer, de façon automatique, quand et où l’appareil du patron de SpaceX et Tesla décollait et atterrissait. Twitter avait communiqué par la suite pour annoncer que son règlement interdisait désormais la plupart des tweets qui indiquaient la position de quelqu’un en temps réel. À son arrivée à la tête de Twitter, Elon Musk avait promis de ne pas toucher au compte @ElonJet.

Loi sur les services numériques (DSA)

La loi sur les services numériques (DSA), un règlement historique entré en vigueur en novembre, impose une longue liste de règles aux plateformes en matière notamment de lutte contre la désinformation, contre les discours haineux, d’utilisation des données sensibles, ainsi que des obligations de transparence. Les très grandes plateformes en ligne (plus de 45 millions d’utilisateurs dans l’UE), comme Twitter, devront appliquer cette législation « vers l’été 2023 ». Ces grands acteurs seront placés directement sous la surveillance de la Commission européenne, qui pourra leur infliger des amendes allant jusqu’à 6% de leur chiffre d’affaires mondial, voire une interdiction d’opérer dans l’UE en cas d’infractions graves répétées.

Respect de la législation européenne

Fin novembre, le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, avait déjà averti Elon Musk qu’il devrait « significativement augmenter les efforts » pour se conformer aux règles de l’UE, après l’annonce par ce réseau social du rétablissement en masse de comptes bannis et de la fin de la lutte contre la désinformation sur le Covid. Thierry Breton avait alors rappelé que le patron de Twitter s’était engagé en mai à se conformer à la nouvelle législation européenne.

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