🇺🇸 Acquérir le Groenland: la première étape du plan de Trump dans une nouvelle guerre froide face à la Chine?
Donald Trump n’a pas attendu son investiture du 20 janvier pour lancer certains de ses grands projets. Comme sa proposition de racheter le Groenland. Une idée qui lui trotte dans la tête depuis un moment, et qui s’inscrit pleinement dans la nouvelle guerre froide entre La Chine et les États-Unis.
Le Groenland, ancienne possession danoise
Le Groenland est la plus grande île du monde et fait partie intégrante du royaume du Danemark, bien qu’il ait obtenu une certaine autonomie en 1979. Celle-ci a été renforcée en 2008, et le gouvernement danois reste responsable des affaires étrangères, de la défense et de la politique financière. Le Danemark verse une subvention annuelle de 7.900 euros à chacun des 56.462 Groenlandais. Le pays aurait le droit de proclamer son indépendance, mais a décidé de ne pas encore passer ce cap. Les deux tiers du territoire du Groenland se situent au-delà du cercle polaire arctique.
Pourquoi Trump veut-il tant le Groenland?
“Pour notre sécurité nationale et la liberté dans le monde entier, posséder et contrôler le Groenland est une nécessité absolue”, a déclaré Trump ce week-end sur Truth Social. Déjà pendant son premier mandat, il avait exprimé son désir d’acquérir l’île. On notera qu’entretemps, la notion “d’achat” a disparu de son discours.
Pour la Chine, le Groenland serait un tremplin vers le continent américain. Les États-Unis ont tout intérêt à l’empêcher de s’y installer
C’est sa position stratégique, au-delà du cercle polaire, qui met le Groenland au cœur de l’actualité. Avec la fonte des glaces due au changement climatique, de nouvelles routes commerciales se trouvent dégagées. Une perspective qui intéresse la Chine, puissance commerciale majeure: le Groenland pourrait devenir une rampe d’accès au continent américain pour Pékin. Les États-Unis ont tout intérêt à empêcher la Chine d’y installer une présence significative, et le souhait de Trump de faire de l’île un territoire américain s’inscrit donc dans ce contexte de rivalité stratégique.
De plus, le sous-sol groenlandais regorge de ressources précieuses: charbon, pétrole, or, argent, cuivre, plomb, zinc, ainsi que 43 des 50 éléments rares essentiels à la fabrication de véhicules électriques, d’éoliennes et d’autres technologies durables. Outre ces intérêts économiques, les États-Unis disposent déjà de la base spatiale stratégique de Pituffik dans le pays, qui abrite l’un des principaux systèmes américains d’alerte antimissile.
Un désir expansionniste qui n’a rien de nouveau
Bien que le Groenland soit politiquement et culturellement lié au Danemark depuis plus d’un siècle, les États-Unis ont exprimé à plusieurs reprises leur intérêt pour ce territoire. Dès 1867, le secrétaire d’État William Seward avait exprimé son souhait d’acheter le Groenland. Après la Seconde Guerre mondiale, le président Truman avait également envisagé de l’acquérir pour tenir les Soviétiques à distance pendant la guerre froide. Dans une logique très proche de celle qui se dessine maintenant face aux Chinois.
Qu’en pensent les Groenlandais et les Danois?
Comme on pouvait s’y attendre, le gouvernement groenlandais a immédiatement rejeté la proposition de Trump, tout comme en 2019, lorsque l’idée avait été évoquée une première fois. Malgré l’argument que cela pourrait ouvrir la voie à des investissements américains accrus dans le tourisme et l’exploitation minière, la Première ministre Múte B. Egede a rapidement rappelé l’autonomie de son pays: “Le Groenland nous appartient, nous ne sommes pas à vendre et nous ne le serons jamais. Nous n’abandonnerons pas notre longue lutte pour la liberté.”
À Copenhague, on louvoie. La Première ministre Mette Frederiksen a réitéré son souhait de collaborer avec l’administration Trump, mais le Danemark a aussi réagi en augmentant son budget de défense pour le Groenland. Des observateurs américains soulignent que la souveraineté danoise n’est pas le seul obstacle à l’enthousiasme de Trump pour cet achat : les communautés autochtones du Groenland s’opposeraient probablement à l’exploitation de “leurs” ressources naturelles par les États-Unis.
Trump, isolationniste ou agressif?
Pendant sa campagne, Trump a promis que l’Amérique ne s’impliquerait plus dans des conflits à l’étranger, comme en Ukraine, et qu’il augmenterait les droits de douane pour ses partenaires commerciaux. Cependant, ces derniers jours, il semble avoir troqué une stratégie isolationniste, suggérée par son slogan “America First”, contre une politique étrangère plus agressive.
Les dĂ©claratiÂons de Trump pourraient indiquer que sa vision de “l’AmĂ©rique d’abord” inclut la nĂ©cessitĂ© pour les États-Unis de montrer leurs muscles en dehors de leurs frontières
D’abord, il suggère que le Canada pourrait devenir le 51e État des États-Unis. Ensuite, il a menacé de reprendre le contrôle du canal de Panama si ce pays ne réduisait pas les tarifs d’utilisation de cette voie économique stratégique.
Il est peu probable que les États-Unis prennent le contrôle du Canada, du Groenland ou du canal de Panama. Cependant, les déclarations de Trump suggèrent que sa vision “America First” implique également que les États-Unis fassent la démonstration de leur puissance au-delà de leurs frontières pour renforcer leurs intérêts commerciaux et sécuritaires.
Même l’archipel presque inhabité des Chagos, dans l’océan Indien, se trouve dans le viseur de Trump. Ces îles, actuellement sous contrôle britannique, abritent une base aérienne américano-britannique. Or, Londres aimerait transférer ces infrastructures vers l’île Maurice. Mais celle-ci entretient des liens étroits avec la Chine. L’idée déplait donc très fort aux Américains.
Ces tendances impérialistes de Trump s’expliquent donc par le renforcement géopolitique de la Chine. La montée en puissance militaire et économique de Pékin est une source de frustration majeure pour les États-Unis. Dans cette nouvelle guerre froide, le Groenland, le canal de Panama et les îles Chagos pourraient devenir des enjeux cruciaux.
7sur7