🇮🇱 Un cessez-le-feu au Liban, mais quid de Gaza? “Le plan d’Israël consiste à diviser et affamer la population”

🇮🇱 Un cessez-le-feu au Liban, mais quid de Gaza? “Le plan d’Israël consiste à diviser et affamer la population”

Au Moyen-Orient, l’attention se concentre depuis des semaines sur le Liban, où le conflit avec le Hezbollah a enfin débouché sur un cessez-le-feu. Mais qu’en est-il de la bande de Gaza? Alors que l’endroit est toujours en proie aux bombardements et aux violences, quel est donc l’objectif d’Israël dans la région?

Si Le Liban a capté l’attention médiatique, ça n’est pas pour autant que les combats ont cessé à Gaza, bien au contraire. Le bilan de pertes parmi les habitants s’élève maintenant à 44.249, selon les derniers chiffres du ministère de la Santé, contrôlé par le Hamas. Parmi ces morts, 2.379 personnes auraient péri depuis qu’Israël a annoncé, le 6 octobre dernier, une nouvelle offensive autour des villes du nord, Jabalia, Beit Lahiya et Beit Hanoun. Celle-ci avait pour objectif d’empêcher le Hamas de s’y regrouper, car celui-ci représente toujours une menace, malgré la mort de son leader Yahya Sinwar. Ce week-end encore, l’organisation a tiré des roquettes sur la base militaire israélienne de Re’im, juste de l’autre côté de la frontière.

Des Palestiniens enterrent leurs morts après une récente frappe aérienne sur Jabalia. © AFP

Un combat sans issue

L’une des actions les plus meurtrières menées par Israël lors de cette nouvelle offensive a eu lieu le 29 octobre à Beit Lahiya. Un terroriste aurait été repéré sur un toit, en train de faire le guet. Pour le neutraliser, le bâtiment de cinq étages a été bombardé, tuant au passage au moins 90 personnes, dont 25 enfants.

C’est un combat sans issue, qui consiste à combattre le Hamas à un endroit, puis à avancer vers un autre endroit, pour finalement revenir au premier par nécessité.

“C’est un combat sans issue ”, estiment un nombre croissant de voix critiques en Israël. L’armée semble passer son temps à combattre le Hamas en un lieu, à avancer vers une autre zone, pour finalement être contraint de revenir au point de départ. “Nous sommes maintenant pour la quatrième fois à Jabalia”, déplore Michael Milshtein, expert sur le conflit israélo-palestinien et Responsable du Forum d’études palestiniennes au Centre Moshe Dayan. “Et il y aura probablement une cinquième et une sixième fois dans les mois à venir.”

Un Palestinien évacue un blessé après une frappe aérienne sur Beit Lahiya. © REUTERS

Diviser et affamer

Avant d’enseigner à l’université de Tel Aviv, Michael Milshstein était ancien officier des renseignements militaires israéliens. Il a estimé auprès de l’agence AP qu’il n’existe en réalité que deux options pour résoudre ce conflit: parvenir à un cessez-le-feu et se retirer de la bande de Gaza, ou bien l’occuper à nouveau entièrement.

Mais le déroulé des hostilités laisse à penser que le gouvernement israélien envisage une troisième option: diviser la bande de Gaza en secteurs et les isoler hermétiquement les uns des autres. Ce modèle a déjà été mis en œuvre dans le passé avec le corridor de Netzarim, une bande de terre reliant la frontière à la côte, équipée d’une nouvelle route et de suffisamment de soldats pour contrôler les passages à travers cette démarcation.

Construction d’infrastructures pour l’armée israélienne le long du corridor de Netzarim, qui divise la bande de Gaza en deux parties. © X (Twitter)

Une approche beaucoup plus dure

Une initiative similaire est en cours, le long d’une ligne allant du poste-frontière de Mefalsim jusqu’à la mer Méditerranée, séparant Jabalia, Beit Lahiya et Beit Hanoun du reste de Gaza. Ensuite, il existerait des plans pour une troisième ligne, partant de Kissufim, destinée à créer une barrière entre les villes de Deir Al-Balah et Khan Younès.

La division en secteurs ressemble étrange­ment à la première phase de ce que l’on appelle le Plan général, une propositi­on qu’une associati­on d’offi­ciers a présentée en septembre.

Cette division en blocs ressemble fortement à la première phase de ce que l’on appelle le “Plan général”. Celui-ci a été proposé en septembre par une association d’officiers en désaccord avec la manière dont la guerre est menée, et qui préconisent une approche beaucoup plus dure contre le Hamas et la population palestinienne.

Benjamin Netanyahu en visite le long du corridor de Netzarim. © Photo News

Couper les vivres

L’objectif de ce plan est de contraindre les civils palestiniens à l’exode, en commençant par le secteur le plus au nord. Cela commencerait par des ordres d’évacuation, comme ceux qui ont déjà été donnés pour l’actuelle offensive. Ensuite, toute forme d’approvisionnement alimentaire serait coupée dans cette zone, de sorte que ceux qui restent sur place finiraient par mourir de faim.

Officiellement, le gouvernement israélien n’a pas approuvé ce plan, notamment parce qu’il constitue une violation flagrante du droit de la guerre. Cela est particulièrement vrai si l’on considère que ce scénario pourrait être répété dans d’autres secteurs si l’évacuation du nord ne suffisait pas à faire plier le Hamas. Une telle démarche pourrait alors être qualifiée de nettoyage ethnique.

Des militants de Nachala, un mouvement israélien radical visant à recoloniser la bande de Gaza. © Instagram

Un plan déjà en cours d’exécution?

Des sources anonymes au sein de l’armée affirment cependant que le plan est déjà mis en œuvre. “Ce que le public entend n’est pas nécessairement ce qui se passe réellement”, a lâché l’une d’entre elles au journal Haaretz, un quotidien israélien réputé critique envers le gouvernement. Le fait est que l’approvisionnement alimentaire vers le nord de Gaza a déjà diminué des deux tiers et les Nations Unies signalent qu’une famine catastrophique risque de s’y développer.

Certains signes indiquent également que l’armée se prépare à un séjour de longue durée, avec de nouvelles infrasc­truc­tu­res construi­tes le long des secteurs

Par ailleurs, d’autres signes indiquent que l’armée se prépare à une présence prolongée. Les sources du Haaretz le déduisent des infrastructures en cours de construction le long des corridors: “On ne construit pas de tels postes militaires et de telles routes pour seulement quelques mois. À ce rythme, il semble que l’armée ne quittera pas ces lieux avant plusieurs années.”

Le ministre des Finances israélien Bezalel Smotrich a déclaré qu’une recolonisation de Gaza “n’était pas un tabou”. © X (Twitter)

Les Israéliens les plus radicaux

Le rêve des plus radicaux dans la société israélienne pourrait finalement se réaliser: expulser les Palestiniens pour s’approprier la bande de Gaza. Le ministre des Finances d’extrême droite, Bezalel Smotrich, ne considère pas cela comme un “tabou”. Lors d’un récent discours, il a déclaré que la “migration volontaire” pourrait réduire de moitié la population de Gaza d’ici deux ans.

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