🇪🇺 Pourquoi les prix du gaz flambent en Europe
Le prix du gaz naturel bat à nouveau des records sur les marchés européens. Ce mercredi, il s’est envolé de 35% à la mi-journée avant de retomber. Principale raison : à l’approche de l’hiver, la demande s’accélère.
Une demande en hausse et des stocks mondiaux bas, voilà ce qui explique la flambée des prix en Europe. Une situation qui entraîne un effet d’aubaine pour les spéculateurs : le prix approche désormais les 2 000 dollars par 1 000 mètres cubes. C’est plus de dix fois plus que le prix moyen enregistré l’année dernière.
Selon certains analystes, cette accélération des prix s’explique notamment par un mouvement de panique et de peur des investisseurs à l’approche de l’hiver dans l’hémisphère nord. Ils mettent aussi en avant la forte demande asiatique, notamment chinoise et le redémarrage rapide de l’économie mondiale après la crise sanitaire.
Une coïncidence de plusieurs facteurs
Jan Horst-Keppler, professeur d’économie à l’Université Paris Dauphine, pointe la sécheresse dans certains pays et les augmentations de température qui ont entraîné une demande plus forte en air conditionné. À cela s’ajoute les réservoirs épuisés par des hivers longs et durs dans certaines régions du monde.
Le spécialiste explique également le manque de stocks en Europe par des interruptions sur la chaîne de valeur du gaz qui ont affecté certains terminaux métayers et les sites de production. Des travaux programmés sur certains gazoducs norvégiens notamment ont perturbé l’offre de gaz réduisant ainsi la production disponible de gaz naturel. « Je crois qu’on est vraiment dans une situation malheureuse qui est la coïncidence de plusieurs facteurs plutôt qu’une seule grande raison sous-jacente », souligne Jan Horst-Keppler.
La flambée actuelle des prix de l’énergie en Europe est, certes unique et brutale, mais elle n’est pas conjoncturelle, estime Thierry Bros, professeur à Sciences-Po et spécialiste des questions énergétiques, pour qui les politiques de transitions énergétiques en Europe sont incohérentes. « Le prix est élevé puisque les politiques européens nous avaient expliqué que le gaz et le pétrole étaient des énergies qui n’étaient plus essentielles. Elles font plus de 5% du mix énergétique. Quand la demande revient, si on n’a pas suffisamment investi, les prix montent. »
Et de prévenir : la hausse du prix du gaz va durer plusieurs mois, car on entre dans l’hiver. Ce n’est donc que vers la fin 2022 que l’on retrouvera des prix plus raisonnables.
L’Europe est elle-même responsable, estime Poutine
Face à cette pression et à la crainte de voir les factures d’énergie miner la reprise, Bruxelles envisage un arsenal de mesures temporaires. Les dirigeants européens réunis en Slovénie ont affiché leurs désaccords quant à la réponse à apporter à cette hausse des prix, la France appelant à une révision importante du marché de l’électricité. L’Espagne quant à elle propose des achats groupés de gaz, sur le modèle de l’approvisionnement européen en vaccins contre le Covid.
La Russie est aussi pointée du doigt. Moscou est soupçonné par les Européens de réduire ses approvisionnements de gaz passant par l’Ukraine afin d’obtenir la mise en service au plus vite de son gazoduc controversé vers l’Allemagne, Nord Stream 2.
Une analyse que le Kremlin rejette en bloc, rapporte notre correspondant à Moscou, Anissa El Jabri. Pour Vladimir Poutine, l’Europe est elle-même responsable de la crise sur les prix du gaz. Son erreur, dit-il, c’est sa stratégie sur les contrats à long terme. Plus tôt ce mercredi, le porte-parole du Kremlin insistait : « La Russie ne peut jouer aucun rôle sur le marché européen du gaz. » Le mois dernier le Kremlin glissait tout de même que le lancement de Nord Stream 2 serait une aide dans la crise énergétique en Europe.
RFI (avec AFP)