Une affaire de violences policières secoue le sommet de l’État français

Une affaire de violences policières secoue le sommet de l’État français

La vidéo sur les réseaux sociaux d’un producteur de musique tabassé par des policiers à Paris suscite de vives réactions depuis ce jeudi. Trois policiers ont été suspendus et l’IGPN a été saisie.

C’est une vidéo virale sur les réseaux sociaux. Le site Loopsider a publié ce jeudi un reportage concernant un producteur de musique qui accuse des policiers de l’avoir tabassé à Paris la semaine dernière, alors qu’il ne portait pas de masque. Des images issues de la vidéosurveillance reflétant des « violences policières édifiantes » selon le média, et qui ont entraîné l’ouverture d’une enquête puis la saisine de l’IGPN.

Des images de la vidéosurveillance
Ce producteur de musique parisien, appelé « Michel » a été suivi jusque dans son studio d’enregistrement du 17e arrondissement après avoir été aperçu sans masque dans la rue le 21 novembre dernier, rapporte Loopsider. Trois policiers l’ont ensuite passé à tabac, pendant plusieurs minutes d’une « violence inouïe ». Sur ces images, provenant de la vidéosurveillance, l’on voit les trois fonctionnaires de police entrer dans le studio en agrippant l’homme puis le frapper à coups de poing, de pied ou de matraque. « Michel » résiste en refusant de se laisser embarquer, puis tente de se protéger le visage et le corps. La scène de lutte dure cinq minutes.

Dans le procès-verbal, les policiers expliquent avoir tenté de l’interpeller pour défaut de port du masque. « Alors que nous tentons de l’intercepter, il nous entraîne de force dans le bâtiment », écrivent-ils. D’après ce récit des agents rédigé le lendemain de l’intervention, l’homme a entrainé les policiers à l’intérieur du bâtiment et il a porté de nombreux coups en direction des policiers, essayant de se saisir de leur arme et de leur matraque télescopique.

Les agents accusés de propos racistes 

La suite de l’enregistrement vidéo montre des personnes, qui se trouvaient dans le sous-sol du studio selon l’AFP, et qui parviennent à rejoindre l’entrée. Les policiers sortent à l’extérieur et la porte du studio est fermée. Ils tentent de forcer la porte et jettent à l’intérieur du studio une grenade lacrymogène qui enfume la pièce. 

Puis les images tournées par des riverains et dévoilées par Loopsider montrent les policiers pointer leurs armes dans la rue et intimer à « Michel » de sortir du studio. Les agents « accusés d’avoir tenu de nombreux propos racistes, s’en sont aussi pris à neuf jeunes artistes présents dans le studio d’enregistrement », indique le journaliste de Loopsider. Certains d’entre eux auraient également été frappés.

L’IGPN saisie et les policiers suspendus

Suite à cette interpellation, « Michel » a dans un premier temps été placé en garde à vue dans le cadre d’une enquête ouverte par le parquet de Paris pour « violences sur personne dépositaire de l’autorité publique » et « rébellion ». Mais finalement cette enquête a été classée et le parquet de Paris a ouvert mardi une nouvelle procédure pour « violences par personnes dépositaires de l’autorité publique » et « faux en écriture publique », confiée à l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), la police des polices.

Les trois policiers mis en cause on été suspendus, indique une source proche du dossier à l’AFP ce jeudi après-midi. Plus tôt dans la journée, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin était intervenu sur Twitter pour demander leur suspension. « Je demande au préfet de police de suspendre à titre conservatoire les policiers concernés. Je souhaite que la procédure disciplinaire puisse être conduite dans les plus brefs délais ». écrit-il.

Réactions en cascade

Cette affaire intervient en pleine polémique sur un projet de loi qui encadre la diffusion des images des forces de l’ordre en opération et après l’évacuation musclée, lundi, d’un camp de migrants au coeur de la capitale. « Si nous n’avions pas les vidéos, mon client serait peut-être actuellement en prison », a dénoncé l’avocate de « Michel », Me Hafida El Ali à l’AFP. 

La classe politique a également vivement réagi. Le patron de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon estime que ces images sont la « preuve terrible du caractère vital du droit à filmer l’action policière. »

« Je souhaite que toute la lumière soit faite rapidement sur cette affaire choquante à tous égards », écrit sur Twitter Frédéric Potier, délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT

« Ces images sont insoutenables », a également réagi sur Twitter le premier adjoint à la mairie de Paris, Emmanuel Grégoire. « Terribles et injustifiables images », a ajouté le député Mathieu Orphelin.

Par Mélanie Juvé, France Bleu