Les Tunisiens appelés à voter pour le second tour de la présidentielle

Les Tunisiens appelés à voter pour le second tour de la présidentielle

Pour ce casting inédit entre l’homme d’affaires Nabil Karoui et l’universitaire Kaïs Saïed, la participation s’est établie à 17,8 % à la mi-journée, soit un taux supérieur à celui du premier tour.

Au terme d’une campagne mouvementée pour leur toute jeune démocratie, les sept millions de Tunisiens ont commencé à voter, dimanche 13 octobre, pour choisir leur président. Devant eux, deux bulletins : Nabil Karoui, un homme d’affaires aux prises avec la justice, et Kaïs Saïed, un universitaire spécialiste du droit.

A la mi-journée, le taux de participation s’est établi à 17,8 %, soit un taux supérieur à celui du premier tour. Le 15 septembre, la participation avait en effet atteint 16,3 % à 13 heures, pour finir à 49 % en fin de journée. Comme lors du premier scrutin, les bureaux fermeront à 18 heures, heure locale.

C’est la troisième fois en un mois que les Tunisiens votent, après un premier tour de la présidentielle anticipée qui a écarté tous les dirigeants sortants et des législatives qui ont accouché d’un Parlement morcelé. Comme lors de ces deux scrutins, des sondages devraient circuler dès le début de soirée. Et les deux camps pourraient proclamer la victoire bien avant la publication des résultats officiels, d’ici mardi. Lire : « Pour l’instant, aucun des deux candidats n’a réellement une idée des priorités de la Tunisie »

Casting surprise

Avec des personnalités aux antipodes, MM. Karoui et Saïed, respectivement 56 et 61 ans, présentent au moins un point commun : ils ont tous deux créé la surprise il y a un mois en parvenant à s’extraire du peloton des vingt-six candidats. Tous deux sont notamment parvenus à prendre l’ascendant sur les dirigeants sortants, sanctionnés par une population exaspérée par les chamailleries politiciennes et l’horizon économique invariablement bouché depuis la révolution de 2011.

La mort en juillet du premier président élu démocratiquement au suffrage universel, Béji Caïd Essebsi, a accéléré cette élection de quelques mois, précipitant le pays dans une saga politique dont le dernier rebondissement a été la libération in extremis mercredi, après plusieurs rejets de la justice, de Nabil Karoui. « Les Tunisiens iront aux urnes sans trop de conviction », écrivait toutefois dimanche le journal francophone Le Quotidien :

« Ce ne sont pas des promesses qui rempliront des ventres et redonneront confiance à un citoyen désemparé et découragé. » Lire : La présidentielle en Tunisie, « c’est un peu comme en France : au premier tour on choisit, au second on élimine »

Face-à-face télévisé

Un duel télévisé sans précédent, et très suivi, a finalement opposé les deux rivaux vendredi soir, aux dernières heures de la campagne. L’homme d’affaires Nabil Karoui, au profil plus pragmatique, s’est montré hésitant et parfois imprécis, 48 heures après sa libération. Ce fondateur de la chaîne privée Nessma TV a prôné à la fois lutte contre la pauvreté et libéralisme économique.

Face à lui, l’expert de droit constitutionnel a une fois de plus affiché son intransigeance. A l’aise sur les questions de gouvernance, il a appelé à changer de système pour rendre « le pouvoir au peuple », tout en exaltant la primauté du droit. « Après ce débat, même Nabil Karoui va voter pour Kaïs Saïed ! », ont ironisé certains internautes. Lire : En Tunisie, la libération de Nabil Karoui relance la campagne présidentielle

Candidat sans parti, M. Saïed, qui fait siennes les valeurs de la révolution et assume son conservatisme sociétal, avait obtenu 18,4 % des voix au premier tour. Plusieurs formations ont appelé à voter pour lui, dont le mouvement d’inspiration islamiste Ennahdha, arrivé en tête des législatives avec 52 sièges sur 217.

M. Karoui, qui se présente sous les couleurs de Qalb Tounes, un parti qu’il a fondé en juin, avait engrangé 15,6 % de voix, depuis sa cellule de prison. Il a martelé que son arrestation, fin août, à quelques jours du début de la campagne de 1er tour, était « politique ». Il a aussi tenté de se présenter en rempart contre l’islamisme, mais peu de formations ont appelé clairement à voter pour lui, y compris au sein de la famille dite progressiste.