Israël intensifie ses raids à Gaza, nouvelles émeutes nocturnes
Plusieurs jours après le regain de tensions entre Israël et les Territoires palestiniens, les frappes israéliennes et tirs de roquettes palestiniennes continuent de se répandre ce jeudi 13 mai. Une nouvelle réunion du Conseil de sécurité de l’ONU est attendue vendredi.
Peu après minuit ce jeudi 13 mai, les alertes à la roquette ont retenti pour la première fois depuis lundi dans le nord d’Israël, tout en reprenant dans le sud du pays et la métropole de Tel Aviv. Cinq personnes ont été blessées quand une roquette s’est abattue dans un complexe résidentiel de Petah Tikva, près de Tel Aviv, selon les secouristes.
Au total, plus d’une centaine de roquettes ont été tirées depuis la bande de Gaza dans la nuit de mercredi à jeudi.
L’impact c’est de dire : nous ne vivons pas tranquille donc vous ne vivrez pas tranquille non plus. C’est ça la stratégie du Hamas, c’est une stratégie de harcèlement.
Face à la menace des tirs de roquettes, tous les vols en direction de l’aéroport international Ben Gourion de Tel-Aviv sont déroutés jusqu’à nouvel ordre, ont annoncé ce jeudi les autorités aéroportuaires israéliennes. Une décision qui n’affecte pas pour l’instant les vols en partance de l’aéroport, où les avions privés sont autorisés à atterrir et où le trafic avait déjà été temporairement suspendu mardi soir, d’après cette source. Une énorme roquette de 250 kg a d’ailleurs été tirée en direction du second aéroport d’Israël, celui vers lequel les vols ont été détournés, un peu plus tard dans la journée, selon le Hamas qui a appelé « les compagnies aériennes internationales à interrompre immédiatement leurs vols vers tout aéroport » en Israël.
Dans le même temps, Benjamin Netanyahu est déterminé à mener les bombardements jusqu’au bout « jusqu’à affaiblir les capacité militaires » du Hamas, rapporte notre correspondant à Jérusalem, Sami Boukhelifa. Israël a poursuivi ses frappes aériennes sur la bande de Gaza. Des locaux liés aux opérations de « contre-renseignement » du Hamas et la résidence d’Iyad Tayeb, un commandant du mouvement, ont été touchés mais aussi des tours, des dizaines d’étages qui hébergeaient des bureaux, des banques, des entreprises, des voitures et des maisons.Le dernier bilan du Hamas communiqué ce jeudi fait état de 83 morts, dont 17 enfants, et 487 blessés. Côté israélien, sept personnes, dont un enfant de 6 ans, sont décédées.
Dans les hôpitaux de Gaza, la situation est qualifiée « d’urgence maximale » par le docteur Mohamed Abu Raya, joint par RFI. « Avec le Covid-19, c’est compliqué. Il est de notre responsabilité de tenir les gens loin de cette menace », ajoute-t-il.
De plus, le personnel hospitalier doit œuvrer avec un système de santé « détruit ». « À Gaza, la majorité de la population souffre, témoigne le médecin. Nous manquons de tout depuis un moment et maintenant ça devient pire. Nous espérons nous sortir de ce cycle de violences et que les gens soient au maximum préservés. Tout ce que nous pouvons espérer, c’est que la communauté internationale va intervenir auprès des Israéliens pour qu’ils cessent ces frappes aériennes parce que la situation ne fait qu’empirer. »
Nouvelle réunion du Conseil de sécurité de l’ONU
Devant l’intensification des combats et l’absence de signe d’apaisement, le Conseil de sécurité de l’ONU doit tenir une troisième réunion d’urgence vendredi, qui cette fois-ci, sera publique. Israël et le Hamas se dirigent vers une « guerre à grande échelle », a alerté l’émissaire de l’ONU pour le Proche-Orient, Tor Wennesland : « Une guerre à Gaza serait dévastatrice et ce sont les gens ordinaires qui en paieraient le prix. »
Après un coup de téléphone entre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le président Joe Biden mercredi, c’est Mahmoud Abbas qui a pu s’entretenir avec Antony Blinken, le chef de la diplomatie américaine. Le président de l’Autorité palestinienne a notamment plaidé pour que les États-Unis fasse « cesser les attaques israéliennes ». En retour, le secrétaire d’État américain a fait part de « la nécessité de mettre fin aux attaques aux tirs de roquette et de faire baisser les tensions ».
Le poids des États-Unis dans ce conflit est le poids que les deux parties veulent bien lui prêter.
Antony Blinken a également réitéré le soutien ferme des États-Unis au droit d’Israël à se défendre, mais a aussi souligné la nécessité d’éviter les victimes civiles. « Il y a tout d’abord une distinction très claire et absolue entre le Hamas, une organisation terroriste qui tire des roquettes de manière indiscriminée, en visant de fait les populations civiles, et la réponse d’Israël qui se défend en visant le Hamas qui tire des roquettes sur Israël, a insisté le chef de la diplomatie américaine. Mais quand on voit des victimes civiles, et particulièrement quand on voit des enfants pris entre deux feux, mourir, cela a un impact puissant. Et je pense qu’Israël a un devoir supplémentaire d’essayer de faire tout son possible pour éviter les victimes civiles, même s’il est légitime de riposter pour défendre son peuple. Et comme je l’ai dit, le peuple palestinien a le droit à la sûreté et à la sécurité. »
Contrairement à Trump, Joe Biden ne sera pas unilatéralement et inconditionnellement du côté d’Israël
Affrontements avec les forces de l’ordre
Le Hamas avait lancé ce lundi une première salve de roquettes vers Israël en guise de « solidarité » avec les centaines de Palestiniens blessés dans des heurts avec la police israélienne sur l’Esplanade des mosquées. Le troisième lieu saint de l’islam est aussi le site le plus sacré du judaïsme situé à Jérusalem-Est, portion de la ville sainte illégalement occupée et annexée par Israël selon le droit international.
Si l’Esplanade des Mosquées semble avoir retrouvé son calme ce jeudi, de nombreuses villes en Israël ont, elles, été le théâtre « d’émeutes » nocturnes, rapporte notre correspondante à Ramallah, Alice Froussard. Mercredi, la soirée avait aussi des airs de guerre, des images terrifiantes ont été diffusées à la télévision montrant des émeutes violentes ou encore des centaines de juifs suprémacistes et des militants d’extrême-droite terrorisant les Palestiniens de nationalité israélienne, dans les villes du nord et de la côte israélienne. De son côté, la police a indiqué « réagir aux incidents violents dans plusieurs villes, notamment Lod, Acre et Haïfa ».
Le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, a d’ailleurs ordonné jeudi un renforcement « massif » des forces de sécurité dans les villes mixtes israéliennes, où cohabitent juifs et arabes, afin de lutter contre les violences de ces derniers jours. « Nous sommes dans une situation d’urgence (…) et il est maintenant nécessaire de renforcer de façon massive les forces sur le terrain », a-t-il déclaré dans un communiqué en annonçant le rappel de dix compagnies de gardes-frontières opérant d’habitude en Cisjordanie occupée.
Dans cette dernière, des manifestations ont encore eu lieu. À Hébron, Naplouse, ou encore Ramallah, trois Palestiniens ont été tués par l’armée, dans ces affrontements.
Netanyahu : « Rien ne justifie le lynchage »
Israël accusait le choc de la diffusion, en direct à la télévision du lynchage d’un homme, considéré arabe par ses agresseurs, près de Tel Aviv. Ces images insoutenables montrent un homme sorti de force de sa voiture puis roué de coups par une foule de plusieurs dizaines de personnes, jusqu’à ce qu’il perde connaissance.
« Ce qu’il se passe depuis ces derniers jours dans les villes d’Israël est insupportable… Rien ne justifie le lynchage d’Arabes par des Juifs et rien ne justifie le lynchage de Juifs par des Arabes », a déclaré dans la nuit Benjamin Netanyahu, disant qu’Israël était confronté à un « combat sur deux fronts ».
RFI