Covid-19 : la létalité du virus augmente en Afrique, continent jusqu’ici plutôt épargné
REVIREMENT – L’Afrique n’avait jusqu’ici été que peu touchée par le Covid-19. Mais depuis quelques semaines, le nombre de contaminations et de décès s’accélère. Au point que le taux de létalité du virus sur le continent est devenu supérieur au reste du monde.
Depuis le début de la pandémie, l’Afrique reste officiellement l’un des continents les moins touchés. Jusqu’alors, 3,3 millions de cas de Covid-19 et presque 82.000 morts ont été décomptés, selon le Centre de contrôle et de prévention des maladies (Africa CDC). L’Europe, qui compte près de deux fois moins d’habitants que l’Afrique, totalisait jeudi huit fois plus de décès (680.452).
Mais il suffit de regarder les derniers chiffres pour voir que la deuxième vague de Covid-19 n’épargne cette fois pas l’Afrique. Le taux de mortalité s’y établit désormais à 2,5% des cas recensés, au-dessus de la moyenne mondiale de 2,2%, rapporte le directeur de Africa CDC, John Nkengasong, lors d’une conférence de presse donnée jeudi.
L’accélération du nombre de cas sature le système de santé
À l’heure actuelle, 21 pays africains enregistrent des taux de mortalité supérieurs à la moyenne mondiale. Parmi eux, la République arabe sahraouie démocratique (RASD), un État membre de l’Union africaine. Avec 11,8% de mortalité, il est le pays le plus touché. Vient ensuite le Soudan, avec 6,2% de létalité, suivi de l’Égypte (5,5%) et du Liberia (4,4%).
Selon John Nkengasong, cette surmortalité est provoquée par l’accélération du nombre de cas, qui engorge les systèmes de santé sur le continent. Ainsi, si la RASD ne compte que 3 cas supplémentaires officiels depuis le 31 décembre, 100 personnes supplémentaires ont été infectées au Liberia, 4.000 au Soudan et 23.000 en Égypte. Et cette montée en puissance du virus ne devrait pas s’arrêter de sitôt, poussée par l’apparition il y a quelques semaines du variant sud-africain, très contagieux. Lors d’une conférence de presse organisée jeudi dernier, la directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique, Matshidiso Moeti, a indiqué qu’il est déjà présent dans au moins quatre pays, sans compter l’Afrique du Sud : le Botswana, la Gambie, le Kenya et la Zambie.
#COVID19 update in Africa as of 22/01/2021 at 9 AM EAT. Cases — 3,365,095., Deaths – 82,891 and Recoveries –2,822,123.
— Africa CDC (@AfricaCDC) January 22, 2021
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La dynamique de l’épidémie « dépasse la capacité des infirmières et des médecins à prendre en charge les patients », explique le directeur de Africa CDC. « Les patients ne bénéficient pas de l’attention et des soins nécessaires car nous avons un nombre limité de lits et de fournitures. » Les stocks d’oxygène, utilisé pour soigner les formes graves de Covid-19, deviennent notamment « critiques ». Dans les colonnes du Parisien, Bernard Zenou, fondateur de Novair, une entreprise spécialisée dans la vente de générateurs d’oxygène, et président de Medigham, l’association internationale des fabricants de ces générateurs, affirme que les besoins dans les hôpitaux du monde entier « ont été multipliés par sept voire dix ». Au Nigeria, pays le plus peuplé d’Afrique, les autorités sanitaires rapportent devoir « choisir quels patients prendre en charge et auxquels refuser les soins », rapporte John Nkengasong lors de la conférence de presse. Selon L’Orient-Le Jour, au moins six patients seraient morts en Égypte des suites d’une pénurie d’oxygène.
L’argent le nerf de la guerre
Comme partout dans le monde, la vaccination contre le Covid-19 représente l’un des principaux espoirs pour endiguer l’épidémie. L’Union africaine a annoncé la semaine dernière avoir commandé 270 millions de vaccins pour le continent. Des négociations sont « en cours » avec la Russie et la Chine pour commander des doses supplémentaires, mais « nous n’avons pas d’accord pour le moment », a rapporté John Nkengasong.
Cette commande doit venir s’ajouter 220 millions de doses initiales prévues via le dispositif Covax, une initiative de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de partenaires privés pour un accès équitable aux vaccins, et pourrait bien être salutaire au continent. Car comme le rapporte la BBC, divers responsables travaillant à l’obtention de doses affirment que l’Afrique devra attendre « des semaines, voire des mois » avant de recevoir les vaccins Covid-19 approuvées par l’OMS.
Le ralentissement du processus s’explique en partie par les stocks constitués par les pays les plus riches en dépit des plus pauvres, des déficits de financements, ou encore des exigences de la chaîne du froid. Selon Tedros Ghebreyesus, directeur général de l’OMS, près de 40 millions de doses ont été administrées dans au moins 49 pays d’Afrique à revenu élevé, contre seulement 25 doses administrées dans un seul des pays à faible revenu. « Pas 25 millions, pas 25 000, juste 25 », a-t-il déploré lors d’une session du Conseil exécutif de l’OMS lundi, dénonçant « un échec moral catastrophique » dont le « le prix sera payé en vies et en moyens de subsistance ».
En plus des inégalités sévissant sur le continent africain, un groupement d’associations et d’activistes appelé The People’s Vaccine Alliance fair remarquer que « les nations riches représentant seulement 14% de la population mondiale avaient acheté plus de la moitié (53%) de tous les vaccins les plus prometteurs », dont la totalité des stocks du vaccin Moderna attendus pour 2021 et 96% de ceux du vaccin Pfizer.
Par LCI