💡 Pourquoi les meilleures idées nous viennent-elles (parfois) sous la douche ?

💡 Pourquoi les meilleures idées nous viennent-elles (parfois) sous la douche ?

Avoir une (très) bonne idée quand on est en train de se laver, dans sa salle de bains… C’est ce que des scientifiques ont appelé « l’effet douche ». Des chercheurs américains ont étudié ce phénomène, et ils viennent de publier une étude consacrée au sujet. Ils pensent pouvoir expliquer comment la douche peut libérer la créativité de l’esprit.

Pourquoi a-t-on parfois de (très) bonnes idées sous la douche ? Depuis des années, des scientifiques tentent de répondre à cette question. Ils veulent comprendre les mécanismes à l’œuvre derrière ce qu’ils appellent parfois « l’effet douche ». Plusieurs chercheurs américains se sont à nouveau intéressés à cette problématique, récemment. Ils ont publié une étude consacrée à cet « effet douche », dans la revue scientifique Psychology of Aesthetics, Creativity, and the Arts, vendredi 30 septembre 2022. Et ils pensent avoir trouvé comment les bonnes idées arrivent (parfois) sous les jets d’eau chaude et dans les volutes de vapeur, comme l’indique le média spécialisé Science Alert.

« L’errance de l’esprit »

Au cœur de cette étude, il y a un concept : celui de « l’errance de l’esprit ». L’idée étant que quand nous faisons une tâche peu exigeante sur le plan intellectuel, nous avons tendance à laisser nos pensées vagabonder. Ce qui permet à la créativité de s’exprimer, selon l’Université de Virginie, aux États-Unis, où l’un des auteurs de l’étude, Zac Irving, est professeur assistant de philosophie.

Le concept n’est pas nouveau. En 2012, une étude publiée dans la revue Psychological Science avait justement souligné les bénéfices de « l’errance de l’esprit » sur le plan créatif, dit Zac Irving. Les auteurs de ces travaux, des scientifiques américains, avaient demandé à des participants de trouver des « usages créatifs et alternatifs » à des objets banals, comme une brique par exemple. Les auteurs de l’étude avaient laissé les participants réfléchir à ces usages en effectuant différents types de tâches, plus ou moins exigeantes sur le plan intellectuel. Et ils avaient découvert que « moins celles-ci étaient exigeantes, plus les participants étaient créatifs ».

Le problème, c’est qu’au cours de la décennie qui a suivi, d’autres chercheurs n’ont pas vraiment réussi à reproduire ces résultats, précise encore l’Université de Virginie. Selon Zac Irving, c’est parce que les auteurs de ces autres études « ne s’intéressaient pas à vraiment l’errance de l’esprit des participants, mais plutôt à leur niveau de distraction ». Et, selon lui, cela change tout.

Les auteurs de l’étude publiée fin septembre 2022 ont repris la méthode de la première étude publiée voici dix ans : ils ont demandé aux 222 participants de trouver des « usages alternatifs » à une brique ou un trombone.

Ceux-ci ont ensuite été divisés en deux groupes. Les premiers ont regardé une vidéo jugée « ennuyeuse » : la séquence montrait deux hommes en train de plier du linge. Les seconds ont posé leurs yeux d’autres images, jugées, elles, « modérément engageantes » sur le plan intellectuel : une scène du film Quand Harry rencontre Sally, sorti en 1989.

Activité « modérément engageante »

Ensuite, les participants ont dû retourner à leur processus de réflexion, réfléchissant à des manières de réinventer l’usage d’une brique ou d’un trombone… Ils ont aussi dû indiquer à quel point leur esprit avait vagabondé durant les visionnages de vidéo, c’est-à-dire dans quelle mesure leurs pensées sautaient librement d’une idée à l’autre.

Les auteurs de l’étude, eux, ont étudié leurs raisonnements. Leur conclusion : les participants qui ont généré le plus d’idées étaient ceux qui avaient regardé le film, l’activité « modérément exigeante » sur le plan intellectuel. Les chercheurs ont ensuite réitéré la même expérience, avec 118 autres participants, mais avec de légères variations. Et leurs conclusions allaient dans le même sens que lors du premier test.

Ce qui fait dire aux scientifiques que oui, « l’errance de l’esprit » facilite l’arrivée d’idées nouvelles, mais, ajoutent-ils, « seulement pendant une activité modérément engageante sur le plan intellectuel, qui place certaines contraintes sur les pensées ». Autrement dit qui demande un minimum de concentration.

Mais comment expliquer cette différence ? Selon les scientifiques, le problème d’une tâche jugée trop ennuyeuse, c’est qu’elle n’occupe pas suffisamment l’esprit et peut donc conduire à repenser à la problématique originale. À ne pas laisser son esprit divaguer, en somme. Et c’est contre-productif, selon eux.

Or, justement, selon Zac Irving, la douche est une activité « modérément exigeante » sur le plan intellectuel, ce qui explique ses vertus. Ce qui, au passage, n’est pas une raison pour passer des heures sous sa douche, surtout en période de sécheresse ! On peut d’ailleurs obtenir les mêmes résultats avec la marche ou encore le jardinage… qui peuvent aussi faciliter le processus de réflexion.

Selon Science Alert, cette nouvelle étude n’explique toutefois pas totalement « l’effet douche ». Ces travaux sont une piste qui peut expliquer le « comment » de cet effet. Mais il reste une question importante : celle du « pourquoi », au juste, de bonnes idées apparaissent parfois quand nous prenons une douche…

Ouest-France