Pourquoi plusieurs pays d’Europe suspendent l’utilisation du vaccin d’AstraZeneca

Pourquoi plusieurs pays d’Europe suspendent l’utilisation du vaccin d’AstraZeneca

Plusieurs pays européens, le Danemark, la Norvège et l’Islande, ont annoncé ce 11 mars qu’ils suspendaient l’utilisation du vaccin d’AstraZeneca contre le COVID-19 après des troubles de la coagulation signalés parmi des personnes vaccinées.

Sept pays européens ont suspendu l’utilisation du serum d’AstraZeneca dans le cadre de la campagne de vaccination. Cette décision survient après la suspension cette semaine par l’Autriche d’un lot de doses du vaccin d’AstraZeneca afin d’enquêter sur le décès d’une femme à la suite de troubles de la coagulation et d’une maladie due à une embolie pulmonaire.

Les autorités danoises ont expliqué avoir pris cette décision après le décès d’une femme de 60 ans, victime d’un caillot sanguin. Elle avait reçu auparavant une injection à partir du même lot de doses utilisées en Autriche. « Nous devons, avec l’Agence danoise des médicaments, répondre aux signalements de possibles effets secondaires importants, à la fois au Danemark et dans d’autres pays européens », a déclaré dans un communiqué le directeur de l’autorité de santé, Søren Brostrøm. « Il n’est pas possible actuellement de conclure s’il y a ou non un lien. Nous agissons tôt, cela nécessite une enquête approfondie », a ajouté par la suite le ministre danois de la Santé, Magnus Heunicke.

L’autorité danoise de la santé, qui a décidé de suspendre l’utilisation du vaccin pendant 14 jours, n’a pas précisé combien de cas avaient été signalés.

Pas de lien de causalité établi

Certains experts estiment qu’il y a peu d’éléments en faveur d’une interdiction du vaccin d’AstraZeneca car le nombre de cas d’apparition de caillots sanguins, à l’origine de thromboses, chez les personnes ayant reçu ce vaccin n’est pas plus élevé proportionnellement que dans la population générale. « Il s’agit d’une mesure d’extrême précaution basée sur des cas isolés en Europe », a déclaré à Reuters Stephen Evans, professeur de pharmaco-épidémiologie à la London School of Hygiene & Tropical Medicine. « Le problème dans les cas signalés spontanés d’effets indésirables en lien avec un vaccin vient de la grande difficulté à distinguer un effet de causalité d’une coïncidence », a-t-il expliqué, ajoutant que le COVID-19 est très fortement associé à la coagulation sanguine.

AstraZeneca a réagi en déclarant que la fiabilité de son vaccin avait été examinée en détail lors d’essais cliniques et que les données examinées par la communauté scientifique avaient confirmé que le vaccin était en général bien toléré. Le groupe pharmaceutique a également rappelé que ses doses de vaccin étaient soumises à des contrôles de qualité rigoureux.

Commentant la décision de Copenhague, l’Agence européenne des médicaments (EMA) a souligné qu’il n’y avait pas de lien établi entre les cas de thrombose signalés et le vaccin, les troubles de la coagulation ne faisant pas partie des effets secondaires reconnus.

L’EMA a ajouté avoir recensé à ce stade 30 cas de thrombose sur environ 5 millions de personnes vaccinées avec le vaccin d’AstraZeneca dans l’Espace économique européen. Elle considère toujours que les bénéfices sont supérieurs aux risques.

Mesures de précaution

Quatre autres pays de l’Union européenne – Estonie, Lettonie, Lituanie et Luxembourg – ont également interrompu les injections à partir du lot d’un million de doses suspecté en Autriche et réparti dans 17 pays européens.

L’agence italienne des médicaments (Aifa) a annoncé ce 11 mars l’interdiction d’un lot de vaccins anti-COVID d’AstraZeneca après avoir été informée de graves effets secondaires, qui n’auraient toutefois aucun rapport avec les cas signalés en Autriche. Cette mesure est prise à titre de précaution car aucun lien n’a été établi pour l’instant entre l’administration des doses de ce lot de vaccin et l’apparition des symptômes, a précisé l’Aifa, qui a dit procéder à toutes les vérifications nécessaires.

La Norvège a également suspendu jeudi, « par mesure de précaution » l’utilisation du vaccin du laboratoire anglo-suédois. [L8N2L94VP]

Les autorités suédoises ont dit pour leur part n’avoir pas trouvé de preuves suffisantes pour arrêter la campagne de vaccination avec les doses d’AstraZeneca. La Suède a fait état de deux cas « d’événements thromboemboliques » – qui se caractérisent par la formation de caillots sanguins – liés au vaccin du laboratoire anglo-suédois et une dizaine concernant le vaccin du duo Pfizer et BioNTech

« Nous ne voyons aucune raison de revoir notre recommandation », a déclaré Veronica Arthurson, responsable de la sécurité des médicaments à l’Agence suédoise des produits médicaux, lors d’une conférence de presse. « Rien n’indique que le vaccin provoque ce type de caillots sanguins », a-t-elle ajouté.

L’agence danoise des médicaments attend de son côté de plus amples investigations de l’EMA.

« Il est important de souligner que nous n’avons pas renoncé à l’utilisation du vaccin d’AstraZeneca, mais que nous la suspendons », a déclaré Søren Brostrøm.

De son côté, l’Espagne a dit jeudi n’avoir enregistré jusqu’à présent aucun cas de caillots sanguins liés au vaccin d’AstraZeneca contre le COVID-19 qui continue à être administré dans le pays. La France est sur la même ligne : le ministre de la Santé n’envisage pas de suspension des injections de ce vaccin, a-t-il déclaré lors de sa conférence de presse hebdomadaire.

Par l’UsineNouvelle Avec Reuters