L’ENA, école des élites françaises, remplacée par un nouvel institut
Emmanuel Macron a réuni jeudi après-midi 8 avril en visioconférence, 600 cadres de la haute administration publique : directeurs des administrations centrale, directeurs des ARS, ambassadeurs…. Le président de la République leur a expliqué les objectifs de la réforme de l’ENA et de la haute fonction publique qu’il entend mener pour redonner du sens à l’action publique et mieux faire fonctionner l’Etat. Des changements qui doivent être officialisés d’ici le mois de juin.
Fini les rentes à vie dans la haute fonction publique. Emmanuel Macron a annoncé ce qui, selon son entourage, veut être plus qu’une réforme, « une révolution ». Une révolution, c’est ce qu’il promettait en 2017, quand il était candidat. Et à un an d’une nouvelle présidentielle, c’est une manière de dire qu’il tient sa promesse et revient à ses fondamentaux, avec une mesure symbolique, la disparition de l’ENA dont le chef de l’État est issu et son remplacement par un Institut du Service Public dont le recrutement devra répondre à d’autres logiques plus ouvertes, pour permettre notamment à des étudiants méritants, mais moins favorisés socialement d’y accéder grâce à l’ouverture de classes préparatoires dans les régions.
La disparition de l’ENA, ce n’est pas la disparition de l’ENA. Il nous faut des hauts-fonctionnaires…
Mais au-delà du recrutement, c’est la gestion des carrières que le chef de l’État veut faire évoluer avec la création d’une vraie direction des ressources humaines pour les administrateurs de l’État dont la mission sera de favoriser la mobilité sur le territoire, la promotion au mérite et de faire de l’expérience de terrain « la première des compétences », dit-on l’Élysée.
C’est démagogique, parce qu’on croit supprimer le problème en supprimant l’école…
Une manière de montrer qu’Emmanuel Macron veut tirer les enseignements de la crise des « gilets jaunes » dans le rapport aux élites et de la crise sanitaire qui a révélé des blocages dans l’appareil d’État. Reste à savoir l’intention sera suivie d’effet.
Je suis atterré par cette décision… L’ENA est un outil diplomatique important au service de la France…
L’ENA fêtait cette année ses 76 ans. Soixante-seize ans à former les hauts-fonctionnaires et dirigeants du pays, mais aussi à s’attirer de nombreuses critiques.
C’est à la sortie de la guerre, en 1945, que le Général de Gaulle fonde l’École nationale d’administration. L’objectif affiché : « refondre la machine administrative française ».
D’abord basée à Paris, puis transférée à Strasbourg en 1991, l’école accueille chaque année une centaine d’étudiants. Ils y apprennent la gestion et l’administration publique, pour devenir les hauts-fonctionnaires de demain. On les retrouve plus tard au Conseil d’État, dans les ministères ou dans les tribunaux administratifs par exemple.
Mais l’ENA semble aussi omniprésente dans les gouvernements français. Sur les 8 derniers présidents de la République quatre sont énarques. C’est le cas d’Emmanuel Macron. Mais aussi d’un tiers des Premiers ministres, à l’image de Jean Castex ou d’Édouard Philippe, d’où ce surnom d’ « anti-chambre du pouvoir ».
Mais l’école a souvent été critiquée pour son élitisme. On lui reproche d’être fermée aux classes populaires. Un exemple : près des trois quarts des étudiants sont des enfants de cadres, un seul élève est enfant d’ouvrier.
Des critiques reprises par les « gilets jaunes ». Car l’un des engagements du candidat Macron était de relancer la mobilité sociale en France.
Nathan Bocard