🇺🇸 Les sept géants de la tech ont perdu 2.150 milliards de dollars en deux mois: que se passe-t-il?

🇺🇸 Les sept géants de la tech ont perdu 2.150 milliards de dollars en deux mois: que se passe-t-il?

Tesla, Apple, Google, Microsoft, Nvidia, Amazon et Meta, longtemps les “chouchous” de la Bourse de Wall Street, affichent une perte de 2.150 milliards de dollars depuis le 1er janvier. Une somme vertigineuse qui s’est évaporée en à peine deux mois. La magie des “Magnificent Seven” (les Sept Fantastiques) a-t-elle vraiment disparu? Et les milliardaires américains comme Elon Musk, Mark Zuckerberg ou Jeff Bezos se sont-ils trompés en misant sur Donald Trump? Des experts expliquent ce qui se passe avec les grandes entreprises technologiques. “Des milliards se déplacent vers la Chine et l’Europe”, explique Tom Simonts, économiste de KBC, à Het Laatste Nieuws.

“Les Magnificent Seven”: le surnom donné aux géants de la Big Tech est-il en passe de devenir désuet? La tendance s’est brusquement inversée depuis peu. Aujourd’hui, Tesla, Google, Microsoft, Nvidia, Apple, Amazon et Meta accusent le coup. Six des sept géants ont vu leur capitalisation boursière chuter de 2.150 milliards de dollars ces dernières semaines. Seule Meta, la maison mère de Facebook et Instagram, a vu sa valeur augmenter ces derniers mois. Pour Apple (-328 milliards), Tesla (-510 milliards) et surtout Nvidia (-658 milliards), l’année 2025 est marquée par une perte colossale de leurs actifs financiers. Pour donner une idée, cette perte représente près de quatre fois la dette publique belge.

Que se passe-t-il au juste? Un vent de panique chez les actionnaires, dû à un climat boursier en mutation, selon Jürgen Ingels, investisseur et entrepreneur dans le domaine de la technologie.

“L’enthousiasme pour les entreprises technologiques n’a cessé de croître ces dernières années, surtout après la percée de l’intelligence artificielle. Cette technologie va certes transformer le monde, mais les valorisations attribuées aux grandes entreprises étaient surévaluées, avec des cours boursiers atteignant parfois quarante fois leur chiffre d’affaires annuel. Si je veux acheter une maison et que je constate que le prix d’achat dépasse ce que je pourrais percevoir en le louant sur trente ans, je renonce aussi. Les ‘Magnificent Seven’ étaient devenus une bulle spéculative, et avec l’évolution du contexte macroéconomique, une forte correction était inévitable. Je pense notamment à la hausse marquée des taux d’intérêt à laquelle sont confrontées les autorités publiques pour emprunter ces derniers jours. Cela entraîne une perte de la valeur des bénéfices futurs des investissements à risque pour les investisseurs, car le rendement des obligations, plus sûres, augmente”.

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Jürgen Ingels, investisseur et entrepreneur dans le domaine de la technologie. © Mats Palinckx

“Avec 4% de Nvidia, on pourrait racheter la moitié de l’Europe”

Même les décisions de Donald Trump, par rapport à sa guerre commerciale et aux droits de douane, affolent les investisseurs américains, selon Tom Simonts, économiste de KBC. “En ce moment, des milliards de dollars se déplacent vers les entreprises technologiques chinoises ainsi que vers l’Europe, où un possible rebond pourrait avoir lieu. Les sommes qui s’évaporent pour les Magnificent Seven sont exorbitantes”.

Il nuance toutefois: “Ces sept entreprises étaient devenues si gigantesques ces dernières années que la moindre baisse en pourcentage représente immédiatement une somme colossale. Lorsque le cours de Nvidia, fabricant de puces électroniques pour l’intelligence artificielle, a chuté de 16% le 27 janvier, cela a entraîné une perte de valeur boursière de 526,8 milliards de dollars en une seule journée – soit plus que ce qu’un pays comme la Norvège ou Israël produit en biens et services en un an. Pour le dire avec une boutade: avec 4% de Nvidia, on pourrait racheter la moitié de l’Europe”.

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© AFP

Ironie du sort?

N’est-ce pas un peu l’ironie du sort que les entreprises dirigées par ceux qui se sont rapprochés de Donald Trump – Elon Musk mais aussi Mark Zuckerberg (Meta), le patron d’Amazon Jeff Bezos, le PDG d’Apple Tim Cook et Sundar Pichai de Google – subissent aujourd’hui une telle déconvenue?

Tom Simonts tempère. “Ces PDG se sont couchés devant Trump dans l’espoir qu’il leur donne le champ libre dans les années à venir. Ces géants veulent continuer à croître. Google ne veut pas que le gouvernement l’oblige à se séparer de YouTube par crainte que l’entreprise devienne trop dominante. Il en va de même pour Amazon: Bezos veut simplement faire tourner sa boutique sans entraves au niveau de la réglementation. Trump crée de l’incertitude, mais pour plusieurs entreprises des ‘Magnificent Seven’, il existe aussi d’autres facteurs qui expliquent pourquoi le conte de fées entre Trump et la Big Tech n’en est pas un pour l’instant”.

“Nvidia, le géant américain des semi-conducteurs, continue de croître fortement, mais plus au rythme de doublement auquel le marché s’était habitué”, analyse le senior financial economist de KBC. “Les investisseurs anticipent aussi le fait que Trump pourrait interdire la vente de puces à la Chine. L’arrivée de DeepSeek, le rival chinois de ‘ChatGPT’ – inquiète également, car elle fait craindre aux investisseurs que trop d’argent soit injecté dans l’IA, ce qui impacte négativement Microsoft et Google. Et puis, il y a encore Elon Musk et ses frasques”.

“Cela nuit à l’image de Tesla”

À ce sujet, Jürgen Ingels tient à faire la distinction entre l’entrepreneur visionnaire, créatif et l’homme, une “brute épaisse”. “Les investisseurs s’attendent à ce qu’il consacre son temps à Tesla et SpaceX, mais ses journées ne comptent que 24 heures. Or, s’il veut aussi s’attaquer comme un forcené à l’ensemble de l’appareil gouvernemental américain, cela lui prend forcément beaucoup de temps”.

Par ailleurs, il y a eu une forme d’immobilisme chez Tesla ces dernières années. Contrairement à de nombreux autres constructeurs automobiles, surtout en Chine, peu de nouveaux modèles ont vu le jour, ce qui laisse même les fans de la marque sur leur faim. Et quand, en plus, Tesla est la cible de vandalisme – comme récemment à Bruxelles – en raison de la personnalité d’Elon Musk, qui affiche ouvertement son soutien à l’extrême droite en Europe, cela nuit à l’image de la marque et à ses ventes”.

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