đ«đ· Emmanuel Macron réélu avec 57% des voix, une nette victoire tempĂ©rĂ©e par une extrĂȘme droite au plus haut

Emmanuel Macron a Ă©tĂ© réélu dimanche Ă la prĂ©sidence de la RĂ©publique avec 57,6 Ă 58,5% des voix face Ă Marine Le Pen (41,5-42,4%) selon les premiĂšres estimations, une nette victoire tempĂ©rĂ©e par lâĂ©cart notablement serrĂ© avec lâextrĂȘme droite et une abstention Ă©levĂ©e (28%).
DonnĂ© de longue date favori Ă sa propre succession, Emmanuel Macron devient Ă 44 ans seulement le premier prĂ©sident sortant reconduit hors cohabitation, depuis lâadoption du vote au suffrage universel direct en 1962. Une forme dâexploit aprĂšs un premier quinquennat pourtant scandĂ© de crises, des âgilets jaunesâ au Covid, qui inscrit le pays dans la continuitĂ© sur ses grandes orientations Ă©conomiques, sur son rĂŽle dans lâUnion europĂ©enne et dans les relations internationales.
Son score de dimanche soir, quâil doit cĂ©lĂ©brer au Champ-de-Mars, face Ă la Tour Eiffel, ne lui offre cependant pas un blanc-seing pour les cinq ans Ă venir, au moment oĂč lâattendent des dĂ©fis colossaux, sur fond de guerre en Ukraine et dâinflation galopante. Dâores et dĂ©jĂ le prĂ©sident-candidat a promis de se renouveler en profondeur, tant sur la forme que sur le fond. Une nĂ©cessitĂ© Ă la tĂȘte dâune France coupĂ©e en deux, voire en trois au regard du nombre dâĂ©lecteurs parmi les 48,7 millions appelĂ©s aux urnes qui ont choisi de bouder les isoloirs dimanche, dans ce remake de 2017 organisĂ© alors que les trois zones scolaires sont en vacances.
ArrivĂ© au pouvoir il y a 5 ans âpar effractionâ, selon ses propres mots, M. Macron poursuit sa trajectoire personnelle mĂ©tĂ©orique, Ă la fois classique (ENA, inspection des finances, ministre de lâEconomie…) et inclassable dans un paysage politique quâil a dynamitĂ©. Mais lui qui avait promis au soir de sa victoire en mai 2017 de âtoutâ faire pour que les Ă©lecteurs ânâaient plus aucune raison de voter pour les extrĂȘmesâ nâa pas rĂ©ussi Ă freiner la montĂ©e en puissance de Marine Le Pen.
La candidate du Rassemblement national, qui avait rĂ©uni 33,9% des voix en 2017, progresse sensiblement au terme dâune campagne au long cours et sans aspĂ©ritĂ©. Mme Le Pen, qui a Ă©normĂ©ment misĂ© sur le pouvoir dâachat pour se dĂ©marquer, sera parvenue Ă lisser son image, sans rien cĂ©der Ă la radicalitĂ© de son projet sur lâimmigration ou la sĂ©curitĂ©.

Fin du âplafond de verreâ
Vingt ans aprĂšs lâĂ©mergence surprise de Jean-Marie Le Pen au second tour de la prĂ©sidentielle (17,79% des voix), jamais lâextrĂȘme droite ne sâest approchĂ©e Ă ce point du pouvoir sous la Ve RĂ©publique. âQuant au plafond de verre, je crois quâon ne peut plus en parlerâ, constate Laurent Jacobelli, un des porte-parole de Mme Le Pen. âCette aptitude Ă capter les colĂšres pour faire des voix progresseâ, observait aussi cette semaine auprĂšs de lâAFP le prĂ©sident de lâAssemblĂ©e nationale Richard Ferrand, traçant un parallĂšle avec âle succĂšs de Trump (aux Etats-Unis), de Bolsonaro (au BrĂ©sil), dâOrban (en Hongrie)â. âCela me fait dire que le combat politique doit continuerâ, plaide-t-il encore.
Pour Marine Le Pen, câest lâheure du bilan aprĂšs un troisiĂšme Ă©chec dans la course Ă lâElysĂ©e. âCâest difficile de se remettre dâune troisiĂšme dĂ©faiteâ mais âdans le paysage des oppositions trĂšs Ă©clatĂ© aujourdâhui (…) Marine Le Pen occupe avec le Rassemblement national la position dominante et elle restera lâopposante en chefâ, anticipait le politologue Pascal Perrineau vendredi sur Public SĂ©nat.
Ce clivage est cependant loin de satisfaire les Français comme en tĂ©moigne le niveau de lâabstention, estimĂ© Ă 28%, soit davantage quâen 2017 (25,44%), et un record depuis la prĂ©sidentielle de 1969 (31%). Exemple parmi tant dâautres, Emmeline Picard, une jeune femme de 28 en recherche dâemploi, interrogĂ©e Ă La Possession, commune de lâouest de lâĂźle de la RĂ©union, qui a choisi de faire lâimpasse. âJe ne vois pas lâintĂ©rĂȘt, je vais tranquillement passer mon dimanche en familleâ, a-t-elle lancĂ© Ă lâAFP.
Le contingent des votes blancs et nuls, qui avait atteint en 2017 un niveau inĂ©dit de 4 millions, devrait lui aussi ĂȘtre fourni. Signe quâil fut difficile Ă M. Macron comme Mme Le Pen de convaincre les orphelins du premier tour, dont une partie des 7 millions dâĂ©lecteurs de lâInsoumis Jean-Luc MĂ©lenchon, arrivĂ© en troisiĂšme position le 10 avril avec prĂšs de 22% des voix.
Place aux âtroisiĂšmes toursâ
Jouant dâavance la carte de lâunitĂ©, M. Macron, qui a beaucoup triangulĂ© Ă droite dans cette Ă©lection, a consenti des inflexions sur son projet pour sĂ©duire Ă gauche: davantage de concertation sur le report Ă 65 ans de lâĂąge de la retraite, et plus dâĂ©cologie aussi, avec la promesse dâune planification en la matiĂšre directement confiĂ©e au futur Premier ministre. Mais avant de rentrer dans le vif du sujet de son deuxiĂšme mandat, M. Macron a devant lui des prochaines semaines oĂč se mĂȘleront rendez-vous institutionnels et manoeuvres politiques.
La date de son investiture formelle nâest pas encore connue mais interviendra nĂ©cessairement avant le 13 mai. Celle-ci devrait alors dĂ©clencher la dĂ©mission de Jean Castex – pas avant le 1er mai, a prĂ©venu M. Macron jeudi – puis la nomination dâun nouveau Premier ministre et la formation du gouvernement. Se profilent surtout Ă lâhorizon les lĂ©gislatives (12 et 19 juin) au cours desquelles le chef de lâEtat essaiera de conserver sa majoritĂ©, avec des dĂ©putĂ©s de La RĂ©publique en marche, du Modem et autres partenaires.
Une bataille trĂšs attendue par M. MĂ©lenchon, qui a demandĂ© cette semaine âaux Français de (l)âĂ©lire Premier ministreâ en votant pour une âmajoritĂ© dâInsoumisâ et de âmembres de lâUnion populaireâ. Un autre âtroisiĂšme tourâ pourrait avoir lieu aussi dans la rue oĂč risquent de converger tous les insatisfaits du scrutin prĂ©sidentiel, sur les braises encore chaudes de la crise des âgilets jaunesâ.
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