Covid-19 : comment le Royaume-Uni a réussi à inverser la tendance face à l’épidémie

Covid-19 : comment le Royaume-Uni a réussi à inverser la tendance face à l’épidémie

En l’espace d’une année, le Royaume-Uni a connu trois confinements, un variant très agressif et une intense campagne de vaccination. S’il a payé un tribut très élevé à cette pandémie, avec plus de 125 000 morts, il espère retrouver une vie normale dès l’été prochain. 

En présentant son plan de déconfinement le 22 février, Boris Johnson a dit ambitionner un retour à la quasi normale pour l’été. Mais est-ce vraiment plausible ? « Ça va être très intéressant de suivre ça », affirme à France 24 Antoine Flahault, médecin épidémiologiste et directeur de l’Institut de santé globale à la faculté de médecine de l’université de Genève. Selon lui, les conditions actuelles pourraient offrir aux Britanniques l’opportunité d’adopter une politique « zéro Covid ». 

« Ils peuvent désormais vouloir complètement se débarrasser de la circulation du virus, en vaccinant toute leur population, comme ils le font actuellement, avec beaucoup de dynamisme, en fermant leurs frontières et en recherchant davantage de façon rétrospective des clusters et chaînes de contamination », poursuit Antoine Flahault, ajoutant qu’aucun pays n’a jusqu’à présent agi en ce sens en Europe, à la différence de plusieurs pays asiatiques.

« Le Royaume-Uni est en mesure de le mettre en œuvre dès maintenant, presque aidé par le Brexit », le contrôle aux frontières étant redevenu possible sur simple décision gouvernementale. « Pour l’instant, ça n’a jamais été la stratégie affichée par Boris Johnson, mais ce pourrait être une tentation afin de pouvoir revivre complètement normalement à l’intérieur des frontières du Royaume-Uni. »

Des « atermoiements » qui ont coûté cher

Cet espoir tranche fortement avec l’inquiétante situation que connaissait ce pays voilà un an. Les mesures de confinement n’ont été décrétées que plus tard. Le Premier ministre, Boris Johnson, a lui-même admis le fait qu’avoir retardé le début du confinement avait été une erreur, selon des déclarations de ses proches alliés, rapportées dimanche par le quotidien britannique The Telegraph.

Le Royaume-Uni ne s’y était résolu que tardivement, après des pays comme l’Italie, l’Espagne ou la France. Les autorités britanniques s’étaient alors donné pour objectif « d’inverser la tendance » en trois mois. Les autorités britanniques avaient dans un premier temps opté pour la souplesse. Mais très vite rattrapé par la pandémie, qui faisait déjà de nombreux morts en Italie, en France et en Espagne, le Royaume-Uni s’est finalement résolu à changer de stratégie face à des prévisions inquiétantes.

Après la fermeture des bars, des restaurants, des salles de sport, puis des écoles, le couperet tombe. « Aucun Premier ministre n’a envie de prendre de telles mesures », déclare Boris Johnson, le 23 mars 2020, lors d’une courte déclaration enregistrée depuis le 10, Downing street. Après dix jours de résistance, le Premier ministre britannique annonce alors enfin un confinement national strict, afin de « sauver des vies et protéger notre NHS [le service de santé national, NDLR] », et éviter d’en arriver à la même situation qu’en Italie, redoutablement touchée par le coronavirus et confinée dès le 9 mars.

Un variant et un reconfinement in extremis

Près d’un an après cette annonce, le Royaume-Uni (66,5 millions d’habitants) recense plus de 125 000 morts, quand l’Italie (60 millions d’habitants) et la France (67 millions d’habitants) en comptent respectivement plus de 102 000 et 90 000.

« Très rapidement, la mortalité s’est envolée lors de la première vague au Royaume-Uni, à un niveau bien supérieur à celui des autres pays européens, et notamment de la France », explique Antoine Flahault. « Le Royaume-Uni a également été à un niveau de mortalité plus élevé que celui de la France et on peut l’attribuer aux atermoiements dans la prise de décision du gouvernement britannique de confiner le pays à un moment qui était à une phase exponentielle de son épidémie. »

En effet, lors de la première vague, et malgré le confinement, une augmentation de la mortalité est constatée dès le 1er avril. Deux mois plus tard, le 5 juin, celui-ci est le seul et premier pays européen à dépasser le seuil des 40 000 morts. Après un été plus calme dans l’ensemble des pays européens, une deuxième vague déferle sur le continent au mois d’octobre avec une diffusion très large du virus et une absence de maîtrise de la pandémie, qui verra apparaître à la mi-décembre le variant britannique, plus contagieux.

Début janvier 2021, le bilan au Royaume-Uni dépasse les 80 000 morts et pousse le gouvernement à reconfiner à l’échelle nationale au moins jusqu’au mois de mars, après un premier reconfinement à Londres et dans le sud-est de l’Angleterre. Au bord de la saturation, le NHS est, selon le conseiller médical en chef du gouvernement, Chris Whitty, confronté à « la situation la plus dangereuse jamais connue ».

« En Europe, on décide de confiner quand le système de santé est vraiment au bord de l’implosion », explique le professeur Antoine Flahault. « Boris Johnson a confiné le 4 janvier parce que le NHS lui avait dit : ‘nous, dans trois semaines, on ne pourra plus soigner les Britanniques correctement si on continue sur cette lancée' ».

Par France 24