Golf, politique, médias, procès : quelle nouvelle vie pour le néo-retraité Donald Trump ?

Golf, politique, médias, procès : quelle nouvelle vie pour le néo-retraité Donald Trump ?

Donald Trump n’est plus président des États-Unis depuis 24 heures. Le milliardaire a laissé planer le mystère sur ses projets tout en multipliant les pistes, entre envies de continuer en politique, investir dans les médias ou reprendre ses affaires immobilières.

Pour Donald Trump, la retraite après quatre ans à la tête de l’État ? Parti en Floride juste avant l’investiture de son successeur Joe Biden, le président sortant a entretenu le mystère quant à ses projets. Il a multiplié les pistes entre retour à la tête de son entreprise, investissements dans les médias ou capitalisation sur sa base politique.

New-Yorkais de naissance, l’ex-président a donc choisi l' »État du soleil » pour commencer sa vie d’après la présidence. À 78 ans, il pourrait simplement couler des jours heureux dans sa résidence luxueuse de Mar-a-Lago, à Palm Beach, jouant au golf, sa grande passion, entouré de sa fille Ivanka et son gendre Jared Kushner, qui ont acheté une propriété non loin. Le tout en profitant des avantages dévolus aux anciens présidents : retraite confortable, protection à vie par le « Secret Service », bureaux à Washington…

Il s’est contenté d’un énigmatique « Je reviendrai d’une manière ou d’une autre », lors de son dernier discours à la base militaire d’Andrews, juste avant de s’envoler pour la Floride.

La veille, il avait également choisi de laisser planer le suspense dans sa vidéo d’adieu : « Maintenant, alors que je me prépare à remettre le pouvoir à une nouvelle administration mercredi midi, je veux que vous sachiez que le mouvement que nous avons lancé ne fait que commencer ».

« Vu la personnalité égocentrique de Donald Trump, on a du mal à l’imaginer Trump quitter la vie publique », estime Virginie Herz, chroniqueuse internationale à France 24.

Un nouveau parti politique ?

Selon le Wall Street Journal, le président américain aurait passé les derniers jours de sa présidence à évoquer avec ses proches la possibilité de créer un parti politique en dehors des républicains. Donald Trump aurait jeté son dévolu sur le nom de « Patriot party », le parti des patriotes.

Donald Trump aurait été déçu du manque de soutien de plusieurs leaders républicains depuis l’émeute du Capitole. Bien qu’en baisse dans l’opinion publique, l’ex-président conserve une solide popularité dans la base républicaine, selon les derniers sondages.

Le pari pourrait être cependant hasardeux : aux États-Unis, « les partis tiers n’ont jamais joué un rôle majeur à l’échelle nationale », rappelle le Wall Street journal. Car c’est bien 2024 que Donald Trump aurait en ligne de mire et l’idée de réitérer l’exploit de Grover Cleveland, seul président américain à avoir effectué deux mandats non consécutifs, à la fin du XIXe siècle.

« Beaucoup de ses supporters ici en Floride espèrent la création de ce troisième parti autour de Donald Trump. Ils sont persuadés que les dizaines de millions d’électeurs de Donald Trump seraient prêts à déserter le parti républicain », relate Emmanuel Saint-Martin, envoyé spécial de France 24 en Floride.

« Écraser Fox News »

Avant de se lancer dans la politique, Donald Trump était avant tout un magnat des affaires et un personnage médiatique. Dans les années 2000, il s’était fait une solide place dans les foyers américains grâce à l’émission de télé-réalité « The Apprentice », où il se mettait en scène dans son rôle préféré : le sien, un autoproclamé « self made man ».

« Il a prévu d’écraser Fox News », explique le site d’information Axios, notant que la rupture était consommée entre le 45e président des États-Unis et la chaîne conservatrice depuis le soir du 3 novembre. L’ancien média favori de Donald Trump a eu l’outrecuidance d’attribuer l’État clé de l’Arizona à Joe Biden avant les autres chaînes, provoquant la fureur du milliardaire.

D’après le pure-player, le président pencherait pour un média en ligne sur abonnement, moins coûteux à mettre en place qu’une chaîne classique. Il capitaliserait sur les listings de ses supporters en leur proposant un abonnement mensuel rivalisant avec celui de la Fox, qui se situe autour de six dollars.

L’ex-président pourrait également être tenté par une collaboration avec des réseaux télévisuels conservateurs plus établis, à l’image de One American News Network (OANN) ou Newsmax, que Donald Trump a préféré à Fox News dans les derniers mois de sa présidence.

Ses affaires battent de l’aile

Une certitude cependant : Donald Trump va reprendre le contrôle de son entreprise familiale, laissée aux mains de ses enfants le temps de la présidence, la Trump Organization. Mais les quatre années de mandat Trump, marquées par des prises de positions extrêmes et les dernières semaines entachées par l’assaut du Capitole par ses fervents partisans, ont rendu périlleuses les affaires de la dynastie.

Avant qu’il ne devienne président, « la marque Trump était très puissante », souligne Melissa Aronczyk, professeure en communication à l’université de Rutgers, dans le New Jersey. « C’était une marque commerciale » à succès, « symbole du luxe », de richesse et de réussite. Des hôtels luxueux aux propriétés immobilières huppées en passant par les parcours de golf, le nom Trump est omniprésent dans les entités de la Trump Organization, dont le siège se trouve dans la Trump Tower à New York, sur l’emblématique 5e Avenue.

Mais cette ère est révolue. La marque Trump est désormais « toxique » car associée au chaos, au racisme, résume Tim Calkins, professeur de marketing à la Kellogg School of Management de l’université Northwestern, à l’AFP.

Depuis les violences du Capitole, les mauvaises nouvelles se sont accumulées. De nombreuses entreprises ont coupé leurs liens ou pris leurs distances avec Donald Trump et sa holding familiale. Signature Bank a commencé à fermer des comptes du président, tandis que la Deutsche Bank ne veut plus faire affaire avec lui.

Le championnat de golf PGA 2022 n’aura pas lieu au Trump National à Bedminster (New Jersey). Le Royal and Ancient Golf Club, l’instance dirigeante du golf mondial, a annoncé que le complexe Trump Turnberry en Écosse, où s’est déjà tenu plusieurs fois le British Open, n’accueillerait pas non plus de sitôt ce tournoi majeur dans le monde du golf.

Le groupe n’étant pas coté en Bourse, les comptes ne sont pas rendus publics. D’après le magazine Forbes, l’empire Trump a généré des revenus de près de 2 milliards de dollars entre 2017 et 2019, mais traîinerait aujourd’hui une dette de quelque 400 millions de dollars.

« Un minuscule pourcentage de ma fortune nette », assurait Donald Trump en octobre dernier, selon le Washington Post.

Et si la justice s’en mêle ?

Enfin, c’est peut-être la justice qui pourrait sonner définitivement le glas des affaires de l’ancien président. L’horizon judiciaire apparaît comme particulièrement sombre et le 20 janvier, il est redevenu un justiciable américain comme un autre.

Le rapport Mueller sur les liens du clan Trump avec la Russie n’avait, lui, débouché sur rien de concret exception faite d’une accusation d’obstruction à la justice, qui pourrait rebondir sans l’immunité de Donald Trump

Plusieurs charges de fraude fiscale existent également, que ce soit au niveau fédéral ou dans l’État de New York. Le 45e président des États-Unis pourrait aussi être poursuivi pour avoir enfreint les lois sur le financement de sa campagne. Son ancien avocat Michael Cohen avait été condamné à trois ans de prison pour cette raison pour son rôle dans l’affaire des paiements à l’ancienne actrice de porno, Stormy Daniels .

D’autres affaires datant d’avant la présidence vont reprendre leur cours. Il est ainsi poursuivi pour diffamation par une femme qu’il a traitée de « menteuse » après que celle-ci l’a accusé de viol.

Enfin, il reste à Donald Trump à affronter son deuxième procès en destitution. Il a été mis formellement en accusation par la Chambre des représentants, contrôlée par les démocrates, pour « incitation à l’insurrection » à la suite de l’attaque du Capitole. C’est désormais au Sénat de juger le président sortant.

Pour que Trump soit reconnu coupable, le Sénat devra le condamner à une majorité des deux tiers. Mais démocrates et républicains pourront-ils s’unir contre l’ancien président ? Entre cette tache indélébile et une éventuelle inéligibilité, la procédure aurait le potentiel de tuer dans l’œuf tous les projets que nourrirait aujourd’hui Donald Trump depuis Mar-a-Lago.

Par France 24